La fabrication de l' « autiste handicapé » : chronique d'un passage à l'acte

Par Claude Wacjman [1] et Olivier Douville [2]

Les lois de 1975 et quelques unes de leurs suites

Il y a deux lois du 30 juin 1975. À coté de la plus connue, la loi d'orientation en faveur des personnes handicapés dont les décrets d'application fixèrent dès 1976 comme objectif prioritaire l'intégration en milieu scolaire, une seconde d'égale importance institue un secteur social et médico-social distinct du secteur sanitaire[3]. Désormais, la personnalité morale des institutions sociales et médico-sociales est primordiale afin que les modalités annuelles de leur budget soient déterminées par une instance de contrôle. L'autorisation de la mise en place et l'éventuelle extension des institutions ainsi fondées et gérées dépend d'une commission — le plus souvent régionale — où se retrouvent, à côté des élus, des représentants de la Sécurité sociale, de l'État, des usagers. Et si certains, tels F. Chapireau jugent que « presque vingt ans après la loi, il apparaît que les objectifs annoncés sont atteints. La loi a été efficace… Un équilibre entre secteur sanitaire et social s'est établi même si il est toujours discuté et discutable »[4], les débats sur la loi de 1975 relative aux personnes handicapés suscitèrent polémiques et controverses. Certes, l'accord se fit pour reconnaître à ces lois le bénéfice de l’accession à un statut de citoyen pour les personnes handicapées qui, il est bon de le redire, viennent alors succéder aux invalides peu et mal assistés dont les deux grandes guerres ont pourvu en nombre le pays.

Il y a peu, voulant tirer des enseignements de l'évolution des soins dans le cadre institutionnel, des auteurs tels que R. Misès et J. Hochmann avancent que « la loi du 30 juin 1975 a accentué l'opposition entre des malades relevant d'une thérapeutique et des handicapés soumis à l'éducation spéciale ». Ils insistent sur le fait que « les pédopsychiatres français pour la plupart estiment que toutes les formes cliniques de la psychose — y compris l'autisme – relèvent d'actions conjointes prenant en compte les dimensions éducatives et pédagogiques, mais sans perdre de vue la visée curative […] À partir de là, pour l'ensemble des troubles graves relevant de dispositifs institutionnels, se trouve progressivement remis en question le clivage institué entre des malades et des handicapés : il faut le souligner car c'est un élément essentiel pour l'avenir ; actuellement, les dispositions prises par les praticiens autant que les directives récentes émanant des pouvoirs publics tendent à ce que la pathologie mentale soit ressaisie dans le lien dialectique qui unit deux versants, celui du processus morbide et celui des handicaps qui en découlent ». Aujourd'hui, on sourit à un tel optimisme, et on découvre que dans un article bien plus récent R. Misès prend un autre ton. Nous y reviendrons.

Quant aux administrateurs, sans doute troublés par la nécessité de contrôler et d'optimiser un dispositif qui a crû de façon peu prévisible, ils s'investissent dans la recherche rétroactive pour tenter de reconsidérer le paysage qu'ils contribuèrent à créer. Mais les normes rétroactives ne tiennent pas compte de l'évolution des techniques cliniques, ni des aléas que fait naître la dégradation des conditions sociales.

Soin et/ou éducation ?

La récente proposition de loi qui vise à déterminer l'autisme comme un handicap au sens de la loi de 1975 sur les personnes handicapés, nous confronte à nouveau aux questions de la nature et du sens du soin versus éducation, et amène à réfléchir sur la dimension du sanitaire lorsqu'elle est prise dans le champ médico-social. Politique d'intégration donc des « jeunes handicapés en milieu scolaire ordinaire » pour reprendre les termes de la Circulaire n° 82-2 et n° 82-048 du 28 janvier 1982 relative à la mise en œuvre d'une politique en faveur des enfants et adolescents handicapés. Cette circulaire propose de façon encourageante cette intégration, afin que chaque enfant puisse évoluer dans « un milieu ordinaire où il puisse développer sa personnalité et faire accepter sa différence ». Pour cela, son rédacteur souhaite « décloisonner le dispositif institutionnel existant dans une perspective d'intégration qui limite les phénomènes d'exclusion ou de ségrégation [par…] un objectif de réinsertion en milieu scolaire ordinaire […] avec, si nécessaire, les soutiens spécialisés pédagogiques et thérapeutiques appropriés ». Ces textes font une large place à l'organisation pédagogique et elles donnent au directeur d'établissement scolaire le rôle de coordinateur des actions d'intégration. Ils affirment aussi que « des formes inédites d'intégration seront encouragées si ces innovations permettent de répondre à des situations individuelles particulière ou d'accueillir des catégories d'enfants jusque là exclues de ce processus dès lors qu'elles n'entraîneront pas de nouvelles formes de ségrégation »[5]. La circulaire associe aux « représentants des ministères de l'éducation nationale et de la solidarité nationale, [… ceux] des autres administrations parties prenantes, et notamment du ministère de la santé ».

Vint ensuite la Circulaire n° 83-4 du 29 janvier 1983 relative à la mise en place d'actions de soutien et de soins spécialisés en vue de l'intégration dans les établissements scolaires ordinaires des enfants et adolescents handicapés. Y est précisé, dans son préambule, que ses dispositions « concernent les enfants et adolescents handicapés ainsi que les enfants en difficulté en raison d'une maladie, de troubles de la personnalité ou de troubles graves du comportement, qui peuvent être insérés en milieu scolaire ordinaire, compte tenu de la nature ou de la gravité de leur affection aussi bien que des moyens mobilisables pour les accueillir ». Les textes ainsi prennent acte de l'existence d'une difficulté psychique établie en dehors de toute considération de mesure de l'intelligence. Les enfants qui manifestent une maladie psychique sont bénéficiaires de ces mesures, sous réserve que « l'étroite collaboration prévue par les textes entre les équipes éducatives et ces services doit se renforcer. Il en sera de même avec les services de psychiatrie infanto-juvénile lorsque la nature psychologique ou psychiatrique d'un trouble d'un enfant le justifie ». L'intégration scolaire doit se faire soit par la « commission départementale de l'éducation spéciale [CDES] dans les cas prévus par la loi d'orientation du 30 juin 1975, soit par le service d'intersecteur de psychiatrie infanto-juvénile, le centre médico-psycho-pédagogique ou tout autre milieu médical où est suivi l'enfant ». Le passage en CDES n'est donc pas tenu pour une obligation en cas de maladie mentale. Or, il nous faut tout de suite remarquer qu'aujourd'hui intégrer législativement l'autisme dans le cadre des handicaps ne peut qu'obliger à ce passage, alors que la plupart des professionnels, des usagers et des familles, bien loin d'entrer dans des impasses conceptuelles et thérapeutique, intègrent de façon complémentaire soin et éducation, dans leurs actions, réflexions et projets.

Le point de vue psychodynamique sur la maladie n'est pas une nouveauté en ce qui concerne l'autisme[6] et il a prévalu sur l'hypothèse du handicap fixé — quoiqu'en prétende U. Frith, par exemple. Et s’il est toujours possible de prendre comme point de départ théorique le postulat selon lequel, parmi les troubles psychiques de l'enfant, on nomme autisme le syndrome décrit par L. Kanner en 1943 sous le nom d'autisme infantile précoce, il convient de décrire sous d'autres termes, et en fonction de la structure de la personnalité , les enfants mutiques, ceux parlant très peu et ceux se refusant à parler. Or, aujourd'hui le syndrome spécifique est souvent confondu avec les psychoses, et tout semble indiquer que cette dilution de l'autisme dans le champ trop vaste de la psychose, permit aussi d'oublier la spécificité de l'autisme. Et ce n'est point là un argument de pure discussion sémiologique. Aussi, en 1988, N. Quemada, dans l'Enquête nationale sur la population prise en charge par les secteurs publics de psychiatrie infanto-juvénile, qu'elle effectue pour le compte de l'INSERM[7] mêle autisme et psychose. Elle y détermine que les psychoses représentent 15% de la totalité des troubles CFTMEA et qu'elles sont traitées en ambulatoire (9%), en hospitalisation temps partiel (46%) ou en hospitalisation temps plein (47%). Elles représentent 14% du nombre des maladies mentales répertoriées (soit 1577 cas sur 11153 dans les structures publiques).

Enquêtes épidémiologiques

D'autres données, d'autres enquêtes, d'autres arrêtés[8], enfin, ne permettent pas de connaître le nombre des enfants concernés par le diagnostic d'autisme. On ne mesure pas l'incidence défavorable amenée par les concentrations de populations en difficulté sociale sur la nature particulière de la psychopathologie de l'enfant, où les maladies mentales sont associées à des facteurs hétérogènes, tels que retard du développement ou évictions scolaires ! Pour que l'autisme soit rendu à une lisibilité épidémiologique, il a fallu attendre la grande enquête qui, pour la première fois, fait apparaître cette catégorie ; elle fut menée en juillet 1993, pour l'OMS et l'INSERM par J.P. Thévénot et, de nouveau, N. Quémada. On y apprend qu' « à partir de 1970 […] la réflexion théorique a remis en cause l'opportunité de la séparation de l'enfant et de son milieu familial [et…] les praticiens ont progressivement disposé sur le terrain d'équipements diversifiés permettant de dispenser des soins ambulatoires ou institutionnels à temps partiel » et que la « relative ouverture des structures de l'Éducation nationale [a] notablement augmenté les possibilités de poursuite des soins en milieu familial et scolaire »[9]. C'est aussi ce qui permet qu'en Ile France le nombre de lits passe de 711 en 1984 à 696 en 1987, puis à 459 en 1992, ce qui représente une diminution de 33% sur ces cinq dernières années[10].

En dépit du faible nombre de malades concernés, se fait jour l'obligation de les situer dans d'autres structures davantage intégrées dans la cité et dans la vie sociale. La complémentarité est souhaitée avec le secteur médico-social. Concrètement elle s'effectue par indications médicales concertées, ou se trouve limitée du fait de manque chronique de places. Dans les établissements temps plein des secteurs publics, « sauf à de très rares exceptions, l'utilisation des instituts médico-éducatifs est réputée difficile : il y a des listes d'attente, les places sont rares et les démarches longues et laborieuses. Une phrase peut résumer l'impression globale : "Les indications d'IMP ne sont pas superposables à celles de l'hospitalisation mais souvent utilisation par défaut faute de place en temps plein ou en hôpital de jour" »[11].

L'enquête sur l'occupation des lits à un moment donné eut lieu le 2 avril 1992 ; ce jour là, 395 enfants étaient hospitalisés à plein temps en Ile de France. 218 présentaient des pathologies psychotiques suivant la CFTMEA[12] ; 57 étaient qualifiés autistes — 53 parmi ces derniers ayant fait l'objet d'autres soins avant l'hospitalisation[13]. Les trois quarts de ces derniers sont présents depuis plus de deux ans ; le quart restant depuis plus de cinq ans[14]. Les projets de sortie orientent plus de la moitié des enfants vers des solutions d'autres hospitalisations à temps plein, à peine un dixième iront vers un hôpital de jour[15]. Le lien entre diagnostic et durée d'hospitalisation est démontré. Ainsi « les différentes formes de psychose infantile (autismes, psychoses déficitaires et psychoses dysharmoniques) représentent 25% des sujets hospitalisés depuis moins d'un an mais 61% de ceux séjournant au-delà »[16]. Pour les motifs de non admission lorsqu'un placement est recherché à la sortie, « s'agissant des enfants autistes, l'argument "manque de place" avoisine les 50 % »[17].

La durée de la recherche nécessaire pour trouver une place est évaluée : « S’agissant de la population des psychoses infantiles, c’est 23 % d’entre elles qui réclament de 1 à 6 mois d’efforts et 68 % pour lesquelles aucune solution n’est trouvée à l’issue des 6 mois »[18]. Aucune solution n’est trouvée pour 32 % de l’ensemble de la population prise en compte, mais, en ce qui concerne les enfants atteints de psychoses infantiles, c’est 52 % de la population pour laquelle on ne trouve pas de place en sortie d’hospitalisation à temps plein[19]. Les données administratives ne recouvrent pas les besoins cliniques, tant en amont qu’en aval de l’offre de soins en pédopsychiatrie. « On doit constater que plus du quart des recherches d’accueil dans un service de psychiatrie n’aboutissent pas ; il en est de même dans 40 % des cas, pour l’accueil en structure médico-éducative à temps plein »[20]. On ne saurait trop insister sur l’importance de cette étude. Des places manquent en sortie d’hospitalisation, et de ce fait les lits accueillent moins de patients par défaut de rotation, et le fait de redéployer les lits en places d’hôpital de jour — on le fera à cette époque — ne résoud rien et ne fait que déplacer cette question de l’hospitalisation à temps plein vers son alternative. « Faire cette constatation c’est aussi souhaiter qu’un travail d’évaluation sur l’adéquation des solutions médico-éducatives aux besoins soit effectué au même titre qu’une évaluation des solutions de type psychiatrique »[21]. Le débat, depuis longtemps ouvert par les associations de parents, s’ouvre aussi dans l’administration. Il devient relayé par les media professionnels.

Ainsi, peut-on lire dès 1994 que « l’autisme, longtemps confiné dans les allées obscures de la psychiatrie, a cheminé depuis vers la place publique […] Les voix des parents se sont élevées pour protester contre l’absence de dialogue avec le corps médical et le silence des institutions », et qu’« à en croire la qualité du dialogue […] le glas des hostilités entre parents et médecins aurait sonné ». Cette alliance s’effectue sur le terrain des difficultés administratives relatives à la création de places au moment où on supprime des lits, — on ne crée pas plus de places qu’il n’y a eu de lits. Aucune évolution dans les institutions soignantes ou éducatives ne se fait jour en termes d’une dynamique de changement de statut. « “Malade ou handicapé ? Je ne sais plus comment qualifier mon enfant”, avoue une mère »[22].

Le rapport de l'IGAS : un texte controversé

L’administration suit de très près la question de l’autisme et cherche à évaluer l’effet de sa médiatisation à travers les modalités de soins proposés. Un rapport de l’IGAS (octobre 1994) y est consacré. Il se présente en trois parties : les diverses théories, l'actuel de la situation et les solutions envisagées. La médiatisation de l’autisme, écrivent les rapporteurs, « a permis une meilleure information des familles qui revendiquent, à juste titre, d’être plus associées à la prise en charge de leur enfant ». Ils ajoutent que « se battre sur l’opposition “soigner ou éduquer”, “handicap ou maladie mentale” apparait bien stérile »[23]. Ce rapport fait date. Il constitue un acte politique, et sur bien des points son esprit peut être bien accueilli. Qui serait en désaccord avec le projet d'une extension du droit aux soins ? Qui refuserait son approbation à l'idée qu'il faille des moyens pour appliquer la politique de sectorisation ? Qui enfin dénierait qu'il est tout à fait nécessaire de mieux former les personnels soignants et éducatifs ayant à prendre en charge des enfants lourdement déficitaires ?

Hélas, ce rapport n'en reste pas là. Il se fait aussi le relais auprès des professionnels et des politiques d'une revendication extrême. À sa façon il milite pour une antipsychiatrie et pour un antipsychanalysme virulent et, tout de même, désuet. Au demeurant, nombre de pédopsychiatres se sont sentis méprisés à la lecture de ce texte où la vérité et la sincérité, le probant et l'ampleur de leur travail sont tenus pour très peu. Les rapporteurs ignorent l'importance des programmes éducatifs à visée thérapeutique dans le cadre des hôpitaux de jour, ils ne mentionnent en rien la qualité de chaque jour du travail qui se fait dans les trois cent intersecteurs de ce pays. L'aspect polémique de ce rapport trace des accusations larvées d'incompétence. Les modèles cognitivistes sont positivés au point qu'un lecteur naïf pourrait y voir une panacée. Le scientisme cognitiviste, dévastateur objectiviste et évaluateur — qui n'est pas la culture de base des équipes de soin existantes — a la préférence. Conséquence : la technocratisation du soin est programmée dans ce rapport qui propose la mise sous tutelle des équipes de secteur, et préconise de ponctionner des postes en créant des centre régionaux. On pressent qu'une telle mise sous contrôle du soin, réduit le secteur à une peau de chagrin, et priverait de ce fait, probablement, les familles d'un accompagnement local. L'acte de soin, la responsabilité du soignant, la possibilité, toujours fragile de travailler avec du tiers familial, passent à la trappe. Scientifiques et politiques prendraient ainsi la place de l'acteur de terrain. Le secteur comme lieu anthropologique et institutionnel est réduit à un dispositif technique, dont facilement évaluable et modifiable, mal compris par les rapporteurs.

Enfin, à côté de constats utiles, que d'absurdités méthodologiques, que de bourdes épistémologiques ! Diverses options théoriques sont passées en revue, sans grande finesse, de la façon dont elles sont usuellement caricaturées dans les media. On y voit s'opposer, comme d'éternels duellistes, la théorie organiciste et la théorie psychanalytique. Psyché contre soma… la chanson est ancienne. Il n'est, au demeurant, pas crédible de mentionner « la » théorie organique. Des recherches en psychopharmacologie, des recherches étiologiques, des hypothèses sur les fonctionnements autistiques, existent, nombreuses et contrastées ; quant à « la psychanalyse des enfants », elle est, on s'en doute, présentée de façon partisane et grossière. Ainsi ce rapport parle-t-il, à vrai dire fort abruptement de « la théorie psychanalytique » au singulier, en la confondant le plus souvent avec la pédopsychiatrie[24]. Autrement, stigmatisée, elle est ramenée au malentendu fondamental (mais ce qui est mal entendu le demeure) qu'initie une lecture superficielle de Maud Mannoni, après laquelle on s’évertue toujours à confondre le sentiment de culpabilité avec la réalité d’une culpabilité consciente. C’est sans doute cela qui fait écrire aux rapporteurs « que les sentiments inconscients de culpabilité des parents soient alimentés par les maladresses de certains analystes selon lesquels la psychose des enfants réalise le fantasme inconscient des parents, n’est certes ni adroit, ni même fondé »[25]. À la psychanalyse fait pièce la méthode TEACCH, dans laquelle, « à la différence des psychiatres, qui attendent que le désir de l’enfant se manifeste, Schopler construit un projet éducatif individualisé, tant dans le domaine développemental et fonctionnel et dans celui de communication. Ceci permet de fixer des objectifs de départ qui peuvent être régulièrement réévalués par l’équipe pour réajuster la prise en charge de l’enfant […] Ce projet éducatif doit être installé très précocement afin de limiter les déficiences de l’enfant, en initiant une communication précoce parents-enfants »[26].

L’importance de la communication avec les parents est mise en avant et recherchée. Les auteurs citent une enquête longitudinale de R. Misès d’où il ressort que « la moitié des cas d’autismes étudiés ont présenté une évolution favorable, sont sortis de l’autisme, ont acquis un langage à valeur communitative [sic], peuvent établir des relations affectives avec l’entourage bien que persistent, chez eux, des difficultés relationnelles ; que l’autre moitié reste en institution avec des capacités de socialisation relativement réduites »[27]. Mais les cliniciens savent combien il est réducteur de vouloir mesure de façon univoque les capacités de socialisation des enfants, qui prennent de formes variées et des destinataires nombreux, qualitativement et quantitativement. En ce qui concerne la façon dont doit être conduite une prise en charge, les auteurs de ce rapport de l’IGAS préconisent qu’après une observation de 6 mois, « il est nécessaire de prévoir un temps de soins intensifs (2 à 4 ans). La durée de cette période dépend du niveau du handicap de l’enfant et de la capacité de la famille à faire face à celui-ci »[28]. Par amalgame de données diverses, et à l’occasion de leur énonciation, pour les représentants de l’administration sanitaire et médico-sociale, l’autisme est dès lors un handicap.

Revient alors la question du manque de places, ou celle de leur accessibilité à cette clientèle déterminée. Ce sont les établissements d’éducation spéciale « qui accueillent aujourd’hui le plus d’autistes (1989 au 1° janvier 1992 […]) même si cette catégorie d’enfants ne constitue qu’une faible minorité de leur clientèle (1,8 %) »[29]. La question du choix de l’établissement est clairement énoncée. « L’orientation vers une institution psychiatrique ou un établissement médico-éducatif dépend plus de la disponibilité des places ou des préférences individuelles des familles que de l’état de santé des intéressés »[30]. L’éthique et le libre choix du médecin en vigueur en France devraient raisonnablement se définir dans ces limites. Mais ce n’est pas si simple. Non seulement on manque de places, mais encore on les refuse aux autistes. « Tant dans les établissements médico-sociaux que dans les services psychiatriques, les refus d’admission d’autistes, ou de certains d’entre eux, semblent souvent liés à la crainte qu’ils perturbent la qualité du travail thérapeutique ou éducatif accompli à l’égard des autres enfants. Même lorsque ce motif n’est pas clairement avancé, il est significatif que le manque de places n’est qu’un argument parmi d’autres avancés pour justifier le refus d’admission »[31], notent les rapporteurs, sans pour autant poser un autre type de question, qui influe sur le plan clinique : par rapport aux théories en présence, quel projet peut-on avoir pour un autiste en fonction de l’évaluation des capacités psychodynamiques : soins ou éducation spéciale ? À ne pas vouloir poser cette question, c’est le retrait ségrégatif et protecteur qui l’emporte : « Le développement d’institutions spécialisées, pour autistes, psychotiques et déficients profonds, est probablement la conclusion à tirer de cette situation », préconisent-ils[32].

À la fin de leur rapport, les membres de l’IGAS reviendront encore sur les effets de la psychanalyse. Leur opposition est grande. Ils écrivent que « certains psychanalystes ont encore tendance à se comporter en accusateurs en laissant entendre aux parents qu’ils sont responsables de l’état de leurs enfants et qu’il serait bon pour eux de suivre une thérapie […] À l’opposé, des éducateurs considérant l’autisme comme un handicap génétique — certains y verront aussi abusivement une “responsabilité” des familles — ne voient un espoir, fort modeste, de progrès que dans un dévouement inlassable et de tous les instants des parents à l’éducation de leurs enfants »[33].

Pourquoi opposer à certains psychanalystes, sans les situer (des lacaniens ? des kleiniens ? des jungiens ? ), des éducateurs non dénommés (Schopler ? ), pour valider le handicap en le fixant sur le seul versant génétique ? Cela introduit la confusion à propos des équipes pluridisciplinaires qui travaillent avec des outils différents à partir de conceptions théoriques communes. Les membres de l’IGAS ne pouvaient l’ignorer, au vu de leur charge de travail passée qui impliquait le contrôle des établissements ou travaillent presque exclusivement de telles équipes, dans le secteur sanitaire aussi bien que dans le secteur médico-social.

Procès d'intention donc, mais qui s'exacerbe dans un contexte neuf. Cependant, ne serait-ce qu'un bref coup d'œil sur l'état actuel de la bibliographie spécialisée consacrée à l'autisme nous apprend que rarement, la créativité des psychanalystes en matière de compréhension de l'autisme, voire en proposition de structure de soin, n'a été aussi vive que lors de ces six dernières années[34]. Des données nouvelles sur les prises en charge institutionnelles commencent à rencontrer leur théorisation (cf. O. Bernard Desoria, D. Laznick-Penot). Des psychanalystes, dont D. Rybas, peuvent démontrer la vacuité des propositions de U. Frith. La méthode TEACCH souffre de nombreuses critiques, fondées, et le travail de l'un d'entre nous, à paraître, Travailler avec des enfants malades mentaux, devrait encore enfoncer le clou[35].

Nous allons maintenant objecter à une des phrases les plus intrépides du rapport. Citons : « Les progrès manifestes de la recherche justifieraient de considérer l'autisme comme un handicap avec les déficiences organiques et les désavantages sociaux qu'il entraîne ». Quelle recherche ? pourquoi tant d'impasses ? Et quand bien même on voudrait ignorer tout des apports des psychanalystes (ce qui n'est pas un bon choix), une telle légèreté donne-t-elle le droit de se satisfaire d'indigences au seul et strict plan de la méthode ? Doit-on encore rappeler que selon l'OMS il est indispensable de distinguer le plan de la maladie de celui de la déficience, de celui des désavantages sociaux et des incapacités ? Sage et élémentaire précaution épistémologique et méthodologique, reconnue, comme cela est normal par le ministère de la santé et, par les rapporteurs de l'IGAS, copieusement maltraitée. Il y eut donc forçage. Ce à quoi adhèrent les rapporteurs est sans mystère : reconduisant les préjugés du sens commun, ils croient au lien univoque entre l'hypothèse organiciste et la réponse éducative. Vieux schéma de la « boîte noire ». Nous n'hésitons pas employer, à leur sujet, le mot de croyance et rejoignons l'affirmation de J. Constant : « Combien de fois faudra-t-il répéter qu'en l'état actuel de nos ignorances il n'y a aucune raison logique pour relier une hypothèse étiologique à un mode de réponse quel qu'il soit »[36].

Il est vrai qu'une certaine littérature sentimentalo-clinique fait, de nos jours, la part belle à d'anciens autistes qui témoignent de leur adaptation réussie aux contraintes et stimulations du social — moins au demeurant parce qu'ils auraient suivi une méthode cognitiviste que parce qu'ils ont eut l'intelligence de bricoler des orthopédies ad hoc, pour contrer leurs angoisse d'anéantissement. Ainsi T. Grandin et sa passionnante Vie d'autiste . Mais là aussi, ce qui est manifestement probant, la possibilité de répondre dans le conformisme le plus plat à l'injonction de rôle social, n'entraîne nulle conviction décisive, pour qui possède un minimum de réflexion et de culture en psychologie clinique : il y eut orientation dans la structure, non métamorphose. Mais aussi de quels autismes s'agit-il ? Nous gagnons toujours à distinguer l'autisme primaire, vivant sans gourmandise de lien, en plein refus de l'altérité, et ces formes d'autismes où se manifeste qu'il arrive à l'enfant d'explorer et de s'accrocher à des signes de la présence de l'autre (c'était, bien sûr, le cas de T. Grandin, enfant). Nous savons aussi, instruits par notre patiente et exigeante clinique quotidienne, en secteur, que des passages entre ces diverses formes d'autisme sont possibles pour des subjectivations, et non seulement pour des performances. Oui, c'est tout un travail psychique de faire naître le regard et la parole parentaux en adresse à cet enfant que son autisme isole des siens (tout n'est pas réductible à du handicap). Et nous avons aussi à entendre comment, pris en charge par des cliniciens de culture analytique et/ou par des psychanalystes, certains enfants autistes en viennent à déployer une parole propre, c'est à dire une parole qui ne soit pas que destinée à coder le monde ou à le rendre identique à une formule conjuratrice. Non, l'abord clinique du réel de l'autisme n'est pas clos. Loin d'être embryonnaire ou virtuellement ruinée, cette clinique est en plein essor à cause, précisément, de l'engagement institutionnel de ceux qui la perpétuent et l'inventent, encore aujourd'hui et de mieux en mieux. C'est presque paradoxal mais c'est ainsi : l'engouement rééducatif pour le handicap, trouve plus de partisans qu'avant, mais moins d'arguments. Un corpus clinique existe qui rend compte des émergences de sujet dans le travail psychothérapeutique et institutionnel avec l'enfant autiste et sa famille[37]. Enfin, depuis les avancées des sémiologues, des psychanalystes et des phénoménologues nous pouvons tenir que toute tentative de réduction de la parole humaine à ses seuls effets de communication est une aporie, au pire une régression conceptuelle. Qui pense ainsi s'exclut du savoir, il ne fait que paraphraser l'opinion.

Après le rapport, d'autres enquêtes et des débats

« L’IGAS dénonce les incohérences de la prise en charge des jeunes autistes »[38] ! C’est sous ce titre paradoxal que le très sérieux journal Le Monde reprend ce rapport. Une réponse tardive des milieux médicaux a lieu en 1995, par la voix du Dr Jean-Pierre Thévenot, qui par ailleurs déploie une intense activité de recherche au sujet des places disponibles en pédopsychiatrie, dans l’attente de pouvoir en rapporter les données aux établissements médico-sociaux. Il confie à Actualités Sociales Hebdomadaires : « Sur les relations avec les parents, “le rapport fait état de la tendance de ‘certains psychanalystes’ à se comporter en accusateurs” […]. Il ne s’agit pas tant de rendre les parents responsables […] que de bien faire entendre […] que la prise en charge […] suppose une participation affective de tous ceux qui ont affaire à l’enfant »[39].

Le rapport de l'ANDEM : Dans son rapport de 1994 sur L’autisme, l’Agence Nationale pour le Développement de l’Évaluation Médicale cherche à éclaircir un certain nombre de notions théoriques. Certains contresens ou une rédaction hâtive lui font écrire que « selon la classification de l’OMS, les psychoses infantiles sont à inclure dans la catégorie diagnostique “autisme infantile”. Dans la classification américaine, les psychoses infantiles ont purement et simplement disparu. Dans la classification française, les psychoses et dysharmonies psychotiques sont des catégories diagnostiques bien individualisées »[40]. En fait, ce qui est décrit est passé dans les faits aux États-Unis et dans d’autres pays asservis à la classification du DSM III R et maintenant du DSM IV, système de classification prétendu athéorique. Il s’agit pourtant bien de théorie, et même de stratégie antipsychanalytique, surtout en France où les conceptions psychodynamiques de la psychanalyse font partie de la culture de la pédopsychiatrie. De plus, l’accréditation de l’idée que la classification française (CFTMEA) n’établit aucune correspondance avec les autres classifications est fausse : elle est compatible avec la CIM 10 de l’OMS, et par elle on peut aussi établir certaines correspondances avec le DSM IV[41]. Pourtant les faits sont là : l’autisme est sur le point d’absorber les psychoses, sans aucun objet théorique ni clinique pour valider ce fait, alors qu’il était, et pour la majorité des cliniciens en France, il reste intégré dans le groupe des psychoses. Aller dans le sens de l’athéorisme américain fait dénommer autisme toutes les psychoses, et pourquoi pas certaines pathologies du narcissisme ou des effets de carences affectives ? C’est dénier la clinique, c’est soigner tout pour n’importe quoi, c’est commettre des erreurs diagnostiques qui ne vont plus assurer une réalité de soins adaptés.

Le chapitre américain serait incomplet sans une référence à la méthode d’Eric Schopler. L’ANDEM signale qu’ « il existe également une vingtaine de classes fonctionnant selon la méthode TEACCH en France : certaines sont intégrées dans des écoles ordinaires (publiques ou privées), d’autres dans des Instituts Médico-Éducatifs (IME) »[42]. La portée de cette méthode toujours médiatisée intellectuellement sans qu’on voit ses modalités pratiques d’application, qui sont parfois coercitives, est enfin clairement délimitée. C’est pourtant à travers ce petit nombre de classes que sont comparés les traitements entrepris dans toute la France. Mais il faut être clair, et sur le point des résultats obtenus par des méthodes comportementales — dont la méthode TEACCH —, le rapport souligne leurs inconvénients majeurs. « Grâce à un traitement comportemental intensif, les comportements autistiques s’améliorent, même s’ils ne disparaissent pas complètement. Mais les comportements autistiques réapparaissent généralement à la fin du traitement comportemental. De plus, sauf dans certains cas où l’intervention comportementale a été précoce et intensive, les sujets restent autistiques »[43]. De plus, « l’absence d’études comparatives ne permet pas de conclure à la supériorité du programme TEACCH sur d’autres méthodes »[44]. À ces méthodes il faut ajouter la relativement nouvelle méthode de communication facilitée qui « suscite depuis quelques années des espoirs. Cependant, les études expérimentales quantitatives […] tendent globalement à invalider la méthode et concluent généralement que les réponses obtenues à l’aide de cette méthode sont en réalité induites, volontairement ou non par le facilitateur »[45].

De toutes les façons, actuellement en France il n'existe qu'une petite vingtaine d'institution où l'on recourt à la méthode TEACCH. Par rapport aux indications psychopharmacologiques, les rapporteurs de l’ANDEM précisent qu’ « il n’existe actuellement aucun médicament curatif des troubles autistiques. De plus, la plupart des médicaments utilisés présentent des inconvénients, mineurs ou majeurs, liés à leurs effets secondaires qui imposent parfois l’arrêt du traitement »[46].

En ce qui concerne la psychothérapie d’inspiration psychanalytique, « ce qui est étudié et commenté dans [l]es études est ainsi l’impact thérapeutique du traitement institutionnel, plus que l’évaluation des effets du traitement psychanalytique lui-même »[47]. Il faut prendre garde, toujours sur le plan de la clinique, de ne pas comparer ce qui n’est pas comparable. Une cure psychanalytique en cabinet ne peut être longtemps assimilée à la cure en institution où le traitement psychanalytique est allié à d’autres éléments institutionnels. On connaît depuis longtemps les avantages et les inconvénients d’une approche par rapport à l’autre. En fait il semble bien qu’une telle évaluation doit se faire en tenant compte en premier lieu des éléments cliniques qui permettent les indications de traitement, ici comme dans d’autres domaines ou la problématiques est une problématique de soins qui repose sur la considération d’un sujet dans la dynamique de son devenir.

Pourtant l’ANDEM reste prudente. Elle complète son jugement par une incise intéressante qui pose à nouveau la question de la place de l’autisme par rapport aux psychoses infantiles. « Le petit nombre d’enfants autistes inclus dans [l]es études incite à la prudence quant à une conclusion solide sur l’efficacité de la prise en charge institutionnelle de ces enfants. Par ailleurs, ces études montrent des résultats des traitements institutionnels plutôt favorables sur le devenir des enfants psychotiques »[48].

Une nouvelle enquête en Ile de France

En 1994, afin de poursuivre leur programme d’évaluation des possibilités de prise en charge pédopsychiatrique en Ile de France, Jean-Pierre Thévenot et Nicole Quémada effectuent une nouvelle enquête[49]. Ils souhaitent qu’ « une mention particulière [soit] faite pour l’autisme. En effet, si la mention “autisme et psychoses” revient de manière fréquente, le premier terme est toujours au singulier et le second au pluriel »[50]. En effet, on a l’habitude de parler du grand groupe des psychoses, depuis que ce groupe a été cliniquement déterminé au début du siècle. Il semble pourtant que l’autisme reste au singulier ; on emploie peu ce substantif au pluriel pour parler des autistes. L’enquête détermine qu’en Ile de France, sur 1804 enfants présents en hôpital de jour du 7 au 11 mars 1994, 320 sont autistes (18 %), parmi les 1200 psychotiques (66 %)[51]. Dans cette série de mesures on semble revenir à plus de clinique, puisqu’il est souligné que « pour 45 % des sujets […] l’admission en hôpital de jour correspond à l’élaboration d’un projet thérapeutique »[52]. On peut s’interroger sur les 55% constituant la majorité de la clientèle, l’obligation de service public n’expliquant pas une aussi grande proportion qui risque d’apparaître comme en désaffection des projets de soins. Les rédacteurs s’interrogent sur un autre plan, celui de la dynamique de leur enquête, rapportée à une dynamique des soins qui s’essouffle : « S’agit-il pour [d]es séjours de longue durée d’un choix thérapeutique délibéré ou bien plus simplement d’une impossibilité à proposer une sortie par manque de solution en aval du fait de l’insuffisance ou de l’inadéquation des équipements médico-sociaux ? »[53]. Ils mettent également l’accent sur l’ « importance des durées de séjour, s’agissant des pathologies les plus lourdement handicapantes, l’autisme et les psychoses déficitaires ; on constate en effet pour ces deux catégories diagnostiques que la durée de séjour la plus largement représentée est égale ou supérieure à 5 ans, 28 % s’agissant des autismes, et 35 % s’agissant des psychoses déficitaires »[54]. D’autre part, les « antécédents institutionnels […] sont signalés pour près de 1/3 des cas »[55], ce qui indique les difficultés thérapeutiques réelles d’avoir à traiter de telles maladies, en regard des « 39 % d’absence de projet [de sortie] pour les enfants autistes »[56]. De plus, statistiquement, « la précocité de l’âge à l’admission (avant 6 ans) ne diminue pas notablement la durée de l’hospitalisation, puisque cette tranche est présente à 27 % depuis moins d’un an, 22 % entre 1 et 3 ans et 28 % depuis plus de 4 ans. C’est l’occasion de se reposer la question de la durée des hospitalisations de jour : choix thérapeutique lié à la pathologie, ou contrainte imposée par les difficultés de réorientation »[57]. Les professionnels savent pourtant combien sur le plan clinique les améliorations sont redevables à une prise en charge précoce des troubles. On ne peut, dans ce cas, se contenter de la seule alternative du commentaire. Une hospitalisation longue produit souvent le bénéfice d’un recouvrement psychique important.

Dans le cadre de cette enquête, qui mérite d’être lue in extenso, « l’ensemble des psychoses représente 63 % des demandes d’admission, dont 19 % d’autisme et 10 % de psychoses déficitaires »[58]. Pourtant, tous les enfants ne sont pas automatiquement admis. C’est ce qui pose la question des places ou la question de la capacité à prodiguer des soins, que l’on oppose à une simple garderie. En cas de non admission « le motif le plus fréquemment invoqué est le manque de place, qui est avancé dans 32 % des cas comme unique argument […] C’est donc pour plus de la moitié des cas (55 %) que l’admission est refusée faute de place adaptée à la demande du patient »[59]. « Sur 5 demandes d’admission pour des enfants ou adolescents présentant une psychose déficitaire, 1 seule est acceptée. Pour les autistes, cette proportion est de 1 sur 4 »[60]. « C’est bien pour près de 2 enfants ou adolescents sur 3 que la demande d’admission en hôpital de jour n’aboutit pas, sur une période de six mois »[61]. « Sur 1252 demandes [d’admission] parvenues pendant la période de référence, seules 346 ont reçu une réponse positive au 31 juillet 1994 »[62].

La question des places qui manquent pour les enfants, télescope avec celle des places qui manquent pour les adultes. La problématique est similaire. « La prise en charge des adultes oscille en permanence entre le sanitaire et le médico-social. Une valse-hésitation provoquée tant par les spécificités de l’autisme (considéré aussi bien comme une maladie que comme un handicap) que par la segmentation technique et législative des deux filières »[63]. Un plan d’action est annoncé, qui vise, par redéploiement de moyens et financements particuliers, à ouvrir de nouvelles places pour les adultes[64].

Une nouvelle Circulaire

Ce plan se concrétise par les dispositions de la Circulaire n° 95-12 du 27 avril 1995, relative à la prise en charge thérapeutique, pédagogique et éducative et à l’insertion sociale des enfants, adolescents et adultes atteints d’un syndrome autistique . Directement inspirée du rapport de l'ANDEM, elle propose un plan de cinq ans conçu en relation étroite « avec les procédures en vigueur en matière de planification sanitaire en santé mentale ainsi qu’avec la planification médico-sociale ». Envisageant le partenariat avec les classes d'intégration scolaire, le texte fait le constat que les classes dites « spécialisées » (CLIS ou SES) ne sont que très peu utilisées « pour ces catégories de personnes ». Une « dominante sanitaire » marque les actions prévues pour les très jeunes enfants, suivies d’actions « à dominante médico-sociale » pour les adolescents et les adultes, avec une « composante pédagogique et éducative » pour les premiers et un « suivi thérapeutique » pour les seconds.

« Les diverses insuffisances tant quantitatives que qualitatives […] évoquées renforcent la fragilisation psychologique des sujets concernés et de leur entourage et montrent l’impérieuse nécessité de promouvoir des programmes d’action fondés sur des techniques adaptées aux enfants, adolescents et adultes autistes, comprenant six principales composantes : dépistage, soins, éducation, socialisation, insertion et accompagnement de l’entourage et s’inscrivant dans un réseau de prise en charge gradué, coordonné et de proximité ». La circulaire insiste sur le fait que les personnels doivent être formés : c’est pourtant l’État lui-même qui assure cette formation par les agréments donnés aux établissements quil autorise en fonction du respect des programmes de formation qu’il impose. De quelle formation s’agit-il ? Faut-il y voir une avancée des thèses cognitivistes ou le souci d’une nouvelle réforme de la formation des éducateurs ?

L’autre souci exprimé par le contenu de la circulaire est celui de la rationalisation des coûts de ces soins institutionnels. Le circuit obligé qu’elle inspire permet de soigner d’abord, et sur un temps donné, avant de passer la main au secteur médico-social réputé deux fois moins coûteux que le sanitaire privé, et jusqu’à six fois moins coûteux que le sanitaire public. On se demande à nouveau, quelle est la place de la clinique et des indications qui déterminent les traitements ? Ne peut-on imaginer qu’une non-hiérarchisation des domaines d’intervention puisse parfois privilégier d’abord une éducation spéciale et ensuite des soins, suivant les problématiques psychodynamiques ? Ces questions sont débattues dans le “Rapport d’orientations des alternatives à l’hospitalisation pour des soins diversifiés et de qualité en psychiatrie”, dit rapport Cléry-Melin. Il souligne à propos des adultes autistes que « l’orientation d’une partie des malades mentaux hospitalisés en psychiatrie vers les institutions sociales et médico-sociales ne pourra que s’accentuer à l’avenir »[65]. Dans un autre article concernant le vingtième anniversaire de la loi de 1975 relative aux personnes handicapées — puisqu’il n’y a que des personnes handicapées qui relèvent du secteur médico-social et non plus des malades stricto sensu — le Dr Philippe Cléry-Melin soutient que « le clivage entre les malades et les handicapés est en effet dépassé, les deux populations se confondant (autisme, sida, myopathie), ne serait-ce qu’en raison des critères d’attribution de l’AAH »[66]. Nous ne pouvons qu'être d'accord avec la thèse qui veut que le clivage n’est pas souhaitable dans la complexité des situations cliniques elles-mêmes clivées, mais l'étonnement vient vite : où se situe la complémentarité nécessaire des actions ?

Action et réactions d'Autisme France

Suite à la publication de la circulaire du 27 avril 1995, dite circulaire Veil, l’association de parents « Autisme France se réjouit que le gouvernement admette, pour les jeunes autistes (0 à 6 ans), la possibilité d’une prise en charge éducative en crèche ou en maternelle [… elle demeure] vigilante concernant le problème du diagnostic et celui de la formation des professionnels spécialisés »[67]. D’un autre côté, les ASH donnent la parole sur ce sujet à un professionnel, Jean-Pierre Rouillon. Il explique que « la difficulté qui conduit à ces conflits entre tendances théoriques et cliniques, c’est que toutes les méthodes visant à éduquer et à soigner ces enfants sont confrontées à l’échec. L’autiste nous met en face d’un échec radical. […] Il s’agit donc d’un traitement éthique, c’est-à-dire d’un traitement qui ne saurait se réduire à la mise en œuvre de simples techniques »[68]. Il défend une option psychanalytique lacanienne qui privilégie, dans quelque secteur que ce soit, une approche soignante versus une approche éducative, voire rééducative.

Une série de questions va lui être posée, parmi lesquelles des lecteurs insistent sur le fait qu’ « il y a une véritable désinformation quand on laisse entendre qu’on ne fait rien pour l’autisme en France […] Par contre, ce qui est réel, c’est l’échec des traitements », et que « pour régler le problème de la prise en charge, on risque de ne plus accorder suffisamment d’attention au soin ». Et aussi « mettre en avant l’autisme, c’est délaisser les autres catégories pour lesquelles il y a aussi des problèmes de prise en charge. Et faire un cas particulier, c’est déjà établir une distinction avec le risque d’une ségrégation »[69]. Ces questions et ces critiques complémentaires vont être amendées par les propos de deux associations de parents qui vont lui répondre, sur le terrain du handicap. Tout d’abord Pro Aid autisme pour qui « “Les autismes et troubles apparentés créent des handicapés à vie pour lesquels une réponse sociale s’impose […] les revendications des associations de familles pour lesquelles la ‘ségrégation’ a plutôt pour nom ‘exclusion’ de fait du dispositif médico-social garanti par la loi de 1975 en faveur des handicapés” »[70]. C’est donc l’aspect de garantie offert par la loi de 1975 qui prédomine : les autistes doivent avoir un statut définitif de handicapé. Ensuite, “Autisme France répond à Jean-Pierre Rouillon” : « “La proposition de loi […] ne privilégie, par conséquent, aucun type de prise en charge [… et permet] aux personnes concernées […] de bénéficier de la loi de 1975 sur les handicapés dont ils étaient fréquemment exclus” »[71]. Cette réponse parait plus mesurée. C’est pourtant cette association qui est à l’initiative de la proposition de loi sur l’autisme, dont on parlera plus tard. Ces réponses sont publiées après sa discussion à l’Assemblée Nationale.

Entre temps, après sa saisine, le Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé rend son avis sur l’autisme. Autisme France dénonce le fait « de privilégier des hypothèses qui rendent les parents responsables de ce trouble, hypothèses non validées scientifiquement ». Sésame autisme réclame « une formation des personnels sans œillères, sans dogme, dans un esprit de tolérance et avec le souci de la pluridisciplinarité »[72].

La proposition de loi de février 1996 à l’Assemblée nationale

Cette proposition de loi tendant à « assurer une prise en charge adaptée de l’autisme » est commentée dès avant sa discussion par les députés. Sa principale disposition est de « mentionner dans la loi l’autisme en tant que handicap spécifique justifiant la création de structure particulière »[73].

La proposition de loi est discutée le 22 février 1996. Le rapporteur rappelle que « 85 questions ont été posées au gouvernement sur ce thème depuis le début de la législature », ainsi qu’une question d’actualité[74]. Il précise que « l’autisme a été décrit pour la première fois en 1947 [sic] par Léo [sic] Kanner, psychiatre américain ». Puis il énonce que, « selon la théorie psychanalytique, l’autisme serait dû à une “dysharmonie” survenue très tôt dans la relation entre la mère et l’enfant, le syndrome autistique se développant en réponse à un dysfonctionnement. Il n’existe aucune étude épidémiologique permettant d’étayer cette théorie »[75]. Dans la suite de sa présentation, il précise que sa proposition prévoit « une référence particulière au syndrome autistique et aux polyhandicaps, l’ambition du texte étant que l’autisme soit considéré comme un handicap. Pourtant, l’inscription d’un handicap spécifique dans un texte à portée générale est contraire au principe d’universalité de la loi et ne semble pas opportune ; elle risquerait, en outre, de susciter des demandes reconventionnelles des autres catégories de handicaps. Mais si le législateur a, jusqu’à ce jour, délibérément écarté toute définition précise du handicap, supprimer ici toute référence à l’autisme reviendrait à vider la proposition de loi de toute signification »[76].

Le Secrétaire d’État à la Santé et à la Sécurité sociale prend ensuite la parole pour affirmer que « tous nous avons été confrontés un jour directement ou indirectement au drame de l’autisme, et nous ne pouvons rester sourds devant la détresse des personnes atteintes et des familles […] Les incertitudes sur l’origine de cette affection et sur les méthodes de prise en charge rendent ce mal d’autant plus insupportable et ajoutent au désarroi des familles »[77]. Il ajoute : « J’ai pu mesurer à quel point l’autisme constitue un très lourd “sur-handicap” »[78].

S’appuyant sur l’actualité d’une cour d’assises ayant dans les heures précédentes acquitté une mère meurtrière de sa fille autiste, l’initiateur du projet de loi s’écrie : « Chacun comprendra que lorsqu’on est seul et désespéré, c’est quelque fois la mort de l’être cher qui apparait comme la solution la plus douce. Mais je veux affirmer que lorsqu’il n’y a plus d’espoir, il reste l’espérance »[79]. Il poursuit : « Notre collègue M[…] écrivait en substance que l’autisme est l’une des situations humaines et médicales qui doivent conduire tout à la fois à l’humilité et à l’espérance. L’humilité, elle apparaît d’abord dans l’acharnement efficace des parents et des associations qui ont tout mis en œuvre pour faire reconnaître par tous ce handicap. Elle apparaît ensuite dans le travail des chercheurs, qui ont précisé le rôle des facteurs génétiques mais qui savent que le diagnostic du syndrome autistique est difficile du fait de son caractère multiforme […] Ouvrons la porte de la citadelle restée imprenable dans laquelle tous ces jeunes qui se sont murés, attendent souvent sans parler ni dormir, sans s’asseoir, sans sourire, que nous leur apportions notre aide […] Parce qu’ils sont privés d’une éducation et d’une prise en charge appropriées, les autistes sont, dans la plupart des cas, difficiles à intégrer dans des structures collectives […] Les parents refusent de plus en plus l’intervention en milieu psychiatrique, dont on connaît les limites et les excès […] Ces approches éducatives, expérimentées depuis plus de vingt ans dans la plupart des pays occidentaux et au Japon, ont fait diminuer le pourcentage d’autistes hospitalisés en institution psychiatrique qui est ainsi passé de 90 % en 1964 à 8 % aujourd’hui dans l’État de Caroline du Nord »[80].

« L’autisme, considéré comme un trouble d’origine psychogénétique fait l’objet d’une prise en charge psychothérapeutique en hôpital de jour. Les établissements adaptés nécessaires font défaut en France ». Un député de l’opposition ajoute que « des établissements spécialisés étrangers accueillent nombre de nos concitoyens autistes et les aident à développer certaines de leurs facultés. 1600 d’entre eux fréquentent des établissements belges. La définition de ce handicap fait encore l’objet de théories médicales divergentes […] entre celles qui privilégient l’approche psychiatrique et celles qui préconisent l’insertion, notamment des enfants et des adolescents, dans des structures médico-éducatives adaptées »[81].

Les débats au Sénat

La proposition de loi pour une prise en charge adaptée de l’autisme vient en discussion au Sénat le 13 juin 1996[82]. Mais loin de l’électoralisme direct manifesté à l’Assemblée Nationale, et aux approximations que nous avons relevées, le débat au Sénat est technique, mieux préparé, tant sur le plan médical et psychopathologique que sur le plan législatif. L’électoralisme se déplace vers les grands électeurs, et le souci de tous les intervenants est de ne pas alourdir de façon inégalitaire les charges des collectivités locales par les dispositions qu’ils pourraient prendre. Un renvoi à l’État du paiement des frais relatifs à la prise en charge adaptée de l’autisme est souhaité par les représentants des formations politiques de l’opposition, alors que ceux représentant la majorité défendent surtout un financement par développement et par redéploiement des moyens existants et, en tout état de cause, « eu égard aux moyens disponibles ». Cette phrase limitative ne sera pas amendée. Son maintien risque de limiter l’application des effets de la loi qui ne saura alors donner toute sa mesure et risquerait alors d’être vidée de sens.

Le rapporteur devant le Sénat déplace la problématique : il s’agit de reconnaître l’effort de prise en charge des autistes par les établissements affiliés à l’UNAPEI[83] — établissements du secteur médico-social relevant de la loi de 1975 —, de le soulager et de le financer. Suivant cette Union, ses établissements reçoivent 20 % d’autistes. Si le rapporteur date correctement l’article princeps de Kanner, il ignore qu’il existe des correspondances de classification entre le DSM IV, la CIM 10 et la CFTMEA. Il souhaite préciser « que la théorie psychanalytique qui attribue à une dysharmonie [sic] entre la mère et l’enfant la cause de l’autisme et qui a été popularisée par les travaux de Bruno Bettelheim avec, notamment La Forteresse vide, n’est plus guère invoquée par les psychiatres »[84]. Un membre de l’opposition ajoute que ces débats « ont fortement culpabilisé des parents, des mères, alors que, déjà, tous les parents, toutes les mères se sentent plus ou moins coupables du handicap de leur enfant »[85]. Sur le plan des références théoriques, un sénateur de la majorité cite Uta Frith. Il explique que « cette maladie, qui devient un handicap, n’est pas la conséquence d’un déficit affectif ou d’un conflit familial. Elle est le résulat d’un trouble profond du développement cognitif qui perturbe profondément la constitution d’une image cohérente de l’espace chez l’enfant. Il y a obstacle à la représentation de ses pensées, de ses désirs et, bien sûr, des autres […] Il convient de donner de l’espoir au-delà d’une revanche anti-psychiatrique destructrice »[86]. Il conclut en affirmant que « l’autisme est un handicap mental particulier, lié à des anomalies du développement cérébral »[87]. Un des ses collègues aura préalablement déclaré que, face à ce type de handicap, « il convient de ne pas négliger les soins médicaux visant, par exemple, à traiter l’anxiété et la dépression »[88], alors qu’un membre de l’opposition proposera, dans le cadre législatif, que « certains autistes légers, qui peuvent être capables de mener une scolarité quasi normale, pourraient fort bien être dispensés de soins, ou, du moins, pourraient les négliger »[89] ! Un autre sénateur de la majorité aura préalablement souhaité « offrir aux enfants des structures éducatives, pédagogiques et thérapeutiques qui ne relèvent plus exclusivement de la pédopsychiatrie », alors qu’il « convient […] que ces établissements pour autistes [adultes] soient médicalisés, c’est-à-dire que le prix de journée au titre de l’hébergement soit pris en charge par le département, le prix de journée correspondant aux soins médicaux et paramédicaux l’étant par l’État »[90]. Suivant la formule du Sénateur de l’opposition qui cite Bettelheim, on voit en effet combien « cette maladie, ce handicap, ce mal — quel que soit le mot qu’on emploie — cet enfermement terrible resiste à l’analyse et aux traitements »[91] [sic !].

En ce qui concerne les « actions de formation sur l’autisme et les psychoses », le Sénateur qui cite U. Frith les destine « à l’intention des médecins, des auxilliaires de puériculture, des assistantes sociales, des éducatrices de jeunes enfants, des enseignants de maternelles », dans un but de dépistage précoce[92]. Ce point a été aussi soulevé par le rapporteur.

Sur le plan moral, presque tous les intervenants dans le débat tiennent à marquer leur humilité face à la souffrance des familles. Le Secrétaire d’État à la santé et à la sécurité sociale, déplore que « les autistes et leur entourage sont en effet trop longtemps restés les exclus des exclus »[93] et il parle de « nos frères et sœurs handicapés »[94]. Enfin, un sénateur de l’opposition rappelle la formule employée par le Président de la République dans son discours célébrant le vingtième anniversaire de la loi de 1975. Il parlait de « nos compatriotes » handicapés[95]. Un autre de ses collègues de la majorité reprend cette formule des « compatriotes » pour la mettre en regard des « prestations sociales » afférentes à la prise en charge des handicaps[96]. Faut-il voir là une gradation ? Ce serait alors l’exclusion annoncée des exclus « des exclus des exclus » ? Les non-compatriotes pourraient-ils ne pas bénéficier des prestations sociales liées au handicap, auquel cas ils seraient destinés à la psychiatrie ? On valide alors la racine du mot aliéné : l’étranger. L’étrange étranger ?

De quelques conséquences concrètes, et à propos de quelques autres prises de position

Au lendemain de la discussion à l’Assemblée nationale, Libération note : « Ce fut un débat sans écart ni polémique, comme si les députés étaient tétanisés par la question abordée »[97]. Les ASH publient la réaction de l’UNAPEI, l’association de parents la plus importante, représentative de la gestion de nombreux établissements médico-sociaux : « L’UNAPEI exprime toutefois ses réserves sur un système qui pourrait conduire à “une forme de ségrégation”. D’autant qu’elle défend l’accueil des enfants et adultes autistes “avec et parmi les autres” au sein des institutions spécialisées »[98].

Dans le même temps, des restrictions budgétaires frappent pour la première fois les prix de journée des hôpitaux de jours et de toutes les autres structures sanitaires, dans une moindre mesure. La loi voulue par une association de parents est rejetée par d’autres parents, qui soutiennent, eux, les psychiatres et les équipes à qui ils confient leurs enfants. « Des parents d’autistes craignent que le mépris affiché d’ores et déjà par l’administration pour les hôpitaux de jour n’aboutisse, à terme, à la fermeture des institutions qui accueillent leurs enfants […] Pierre Rivière, psychiatre […] estime que “quand le pouvoir décide que l’autisme est un handicap, c’est comme s’il s’arrogeait le droit de décréter, pour les malades du sida, qu’en dessous d’un certain nombre de T4, ils ne seraient plus soignés […] Les textes jettent le discrédit sur les hôpitaux de jour en affirmant que les structures n’ont pas évolué et sont inadaptées” »[99]. D’autre part, des pétitionnaires s’adressent au Secrétaire d’État à la Santé et se plaignent du fait que les « équipes psychiatriques […] sont, depuis des années, “obligées de plaider cette cause auprès des pouvoirs publics de plus en plus sourds” »[100].

Dans cette polémique, nous ferons place à un texte important signé de Roger Misès, publié dans La Lettre de Psychiatrie française. S’il n’est pas repris ailleurs, il restera d’une diffusion confidentielle. L'article de R. Misès relate les dessous de l’affaire. « Appuyée par quelques spécialistes des neurosciences, une association de parents (Autisme France) mène campagne pour qu’à l’instar de la Caroline du Nord, la gestion de l’autisme en France soit concédé aux tenants du programme TEACCH ou de méthodes similaires l’essentiel étant l’exclusion de la thérapeutique psychiatrique et, a fortiori, des perspectives psychothérapiques […] Autisme France a donc poursuivi ses actions […] : d’un côté, par la voie parlementaire, d’un autre côté, par la saisine du Comité Consultatif National d’Éthique (CCNE) […] Ces défauts d’une information objective […] font regretter que le CCNE n’ait pas fait appel aux associations scientifiques de psychiatres et aux chercheurs cliniciens, notamment le réseau INSERM […] Il en résulte un rapport partisan, fondé sur des données inexactes […] sous le seul angle des neurosciences […] sans même évoquer l’intérêt des recherches cliniques »[101]. Mais quoi qu’on fasse maintenant ou plus tard, il est sûr qu’un effet a eu lieu, que la représentation que les politiques et les administrateurs ont de l’autisme a changé, et que le devenir des autistes, déjà bien souvent figés, va s’alourdir encore compte tenu des effets de fixité dans le traitement qu’impose la stigmatisation « handicap » et compte tenu de l’effet sur les décisions budgétaires de cette priorité donnée au pôle rééducatif et aux instutions pour handicapés.

De çi de là, le soin n’est plus reconnu comme priorité. Par exemple une lettre du Directeur de l’Académie de Paris, datée du 30 mars 1996, adressée à un hôpital de jour pour justifier de la suppression d’un poste d’instituteur spécialisé, contient cette phrase qui recouvre et méconnait les textes qui ont fondé les actions d’intégration scolaire. « La loi d’orientation du 30 juin 1975 a institué l’obligation éducative pour les enfants et adolescents handicapés. En ce qui concerne les enfants malades, il n’existe aucune obligation réglementaire ». Cela est en contradiction flagrante avec le contenu de la Circulaire du 18 novembre 199 — visée par la loi du 11 juillet 1975 relative à l’éducation, oubliée [?] par le Directeur de l’Académie de Paris — sur la Scolarisation des enfants et adolescents accueillis dans les établissements à caractère médical, sanitaire ou social Elle stipule, dans son préambule que « les enfants ou adolescents hospitalisés ou accueillis dans ces établissements demeurent soumis à l’obligation scolaire », et qu’elle vise à assurer dans ce cadre « la scolarisation la mieux adaptée possible ».

Mais est-ce que des circulaires sont à proprement parler des textes réglementaires ?

Ça dépend des fois.

Mais là ce n’est plus de l’humour : bientôt il vaudra mieux être handicapé que malade si on veut savoir lire, écrire et compter.

Claude Wacjman et Olivier Douville

Références

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“Autisme : le plan d’action est sur les rails”, Actualités Sociales Hebdomadaires, n° 1922, 14 avril 1995, p. 19.

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F. Chapireau : " Il y a vingt ans: la loi sur les institutions sociales et médico-sociales." L'Information Psychiatrique, 71, 1, 1995 pp 64-67

Circulaire n° 82-2 et n° 82-048 du 28 janvier 1982 relative à la mise en œuvre d’une politique d’intégration en faveur des enfants et adolescents handicapés.

Circulaire n° 83-4 du 29 janvier 1983 relative à la mise en place d’actions de soutien et de soins spécialisés en vue de l’intégration dans les établissements scolaires ordinaires des enfants et adolescents handicapés ou en difficulté en raison d’une maladie, de troubles de la personnalité ou de graves troubles du comportement.

Circulaire n° 91-303 du 18 novembre 1991 relative à la scolarisation des enfants et adolescents accueillis dans les établissements à caractère médical, sanitaire et social.

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[1] Psychologue, Directeur de l'Hôpital de Jour pour Enfants, Fondation Croix Saint-Simon, 75020 Paris.

[2] Psychologue clinicien, CHS de Ville-Evrard.Maître de Conférences en Psychopathologie, Université de Rennes 2. Laboratoire de Cliniques Psychologiques (Rennes 2). Membre du conseil scientifique du Laboratoire de Psychologie Clinique et Sociale (Paris 7).

[3] La séparation des deux secteurs a été décidée par la loi de réforme hospitalière du 31 juillet 1970.

[4] F.Chapireau "Il y a vingt ans : la loi sur les institutions médicales et médico-sociales". L'Information Psychiatrique, 71, 1, 1995 pp. 66.

[5] Observateur privilégié, compte tenu de son travail dans un centre de formation d'éducateurs spécialisés, l'un d'entre nous a pu voir combien cette circulaire a été bénéfique à des enfants hier isolés, en raison de leur difficultés physiques et/ou psychiques.

[6] cf. l'article de l'un de nous dans ce même numéro.

[7] Enquête effectuée du 30 mai au 12 juin 1988.

[8] cf. l’Arrêté du 11 février 1991 relatif aux indices de besoins concernat les équipements psychiatriques.

[9] Enquête sur les demandes d'hospitalisation à temps complet en psychiatrie infanto-juvénile en Ile de France, 1° janvier-30 juin 1992, p. 2.

[10] id, p. 3 et p. 6.

[11] id, p. 21.

[12] id, p. 29.

[13] id, p. 33.

[14] id, p. 37.

[15] id, p. 38.

[16] id, p. 43.

[17] id, p. 60.

[18] id, p. 77.

[19] id, p. 79.

[20] id, p. 80.

[21] id, p. 81.

[22] “Autisme et psychose : coopérer pour soigner sans exclure”, Pascale Aeby, Actualités Sociales Hebdomadaires, n° 1897, 20 octobre 1994, p. 9.

[23] La prise en charge des enfants et adolescents autistes, Jacques Viviès, Françoise Varet, Rapport IGAS n° 94099, octobre 1994, p. 2. Ce rapport documenté présente les avancées et les oppositions des diverses théories et disciplines représentées. Pourtant sa relecture a péché : on y cite « Léon [sic] Kanner », psychiatre américain d’origine allemande, p. 5.

[24] Sur ce point lire Constant J. "Autisme infantile : étude de l'Andem, rapport de l'IGAS, L'Information psychiatrique, 71,1, 1995, p. 71.

[25] Rapport IGAS n° 94099, octobre 1994, p. 7.

[26] id, p. 9.

[27] id, p. 13.

[28] id, p. 27.

[29] id, p. 32.

[30] id, pp. 32-33.

[31] id, p. 45.

[32] id, p. 46.

[33] id.

[34] Le lecteur pourra se reporter à la bibliographie de l'article d'O. Douville dans ce même numéro.

[35] Livre de Claude Wacjman à paraître chez Dunod, 1997.

[36] article cité, p. 72.

[37] cf. note 35.

[38] Laurence Folléa, Le Monde, 27-28 novembre 1994. La journaliste reprend avec confiance les données du rapport et cite « Le psychiatre allemand Léon Kanner [sic] ».

[39] “Autisme : réaction au rapport IGAS”, Actualités Sociales Hebdomadaires, n° 1916, 2 mars 1995, p. 25. Crochets de la rédaction ASH.

[40] id, p. 10.

[41] Voir la troisième édition de la Classification française des troubles mentaux de l’enfant et de l’adolescent — Classification internationale des troubles mentaux et du comportement (Chapitre V de la CIM 10-OMS, présentation R. Misès et N. Quémada, Paris, CTNERHI/Ministère des affaires sociales et de l’intégration/OMS, 1993. En outre, l’ouvrage présente le “Tableau d’équivalences entre la classification française des troubles mentaux de l’enfant et de l’adolescent et la 10° révision de la Classification internationale des maladies de l’OMS”.

[42] id, p. 21.

[43] id, p. 29.

[44] id, p. 35.

[45] id, p. 48.

[46] id, p. 27.

[47] id,.. p. 29.

[48] id, p. 42.

[49] Enquête sur les Hôpitaux de Jour, 1° février-31 juillet 1994, , OMS/INSERM, novembre 1995.

[50] id., p. 19.

[51] id., pp. 34-35.

[52] id., p. 37.

[53] id., p. 39.

[54] id., p. 45.

[55] id., p. 49.

[56] id., p. 53.

[57] id., p. 59.

[58] id., p. 71.

[59] id., p. 83.

[60] id., p. 89.

[61] id., p. 94.

[62] id., p. 114.

[63] Jérôme Vachon : “Autistes adultes : plaidoyer pour un accueil personnalisé”, Actualités Sociales Hebdomadaires, , n° 1917, 10 mars 1995. Ici p. 15.

[64] “Autisme : le plan d’action est sur les rails”, Actualités Sociales Hebdomadaires, n° 1922, 14 avril 1995, p. 19.

[65] Docteur Philippe Cléry-Melin, psychiatre. Voir : “Alternatives en psychiatrie : premiers constats”, Actualités Sociales Hebdomadaires, n° 1924, 28 avril 1995, p. 25.

[66] Jérôme Vachon : “Handicapés : la loi de 1975 vingt ans après…”, Actualités Sociales Hebdomadaires, n° 1927, 19 mai 1995. Ici p. 14.

[67] “Autisme France entend demeurer vigilante”, Actualités Sociales Hebdomadaires, n° 1931, 16 juin 1995, p. 26.

[68] Jean-Pierre Rouillon : “Autisme : « Prendre en considération la question du sujet », Actualités Sociales Hebdomadaires, n° 1931, 16 juin 1995, p. 27.

[69] “Questions à … Jean-Pierre Rouillon, sur la proposition de loi sur l’autisme”, Actualités Sociales Hebdomadaires, n° 1964, 1° mars 1996, p. 29.

[70] “Pro Aid autisme répond à Jean-Pierre Rouillon”, Actualités Sociales Hebdomadaires, n° 1965, 8 mars 1996, p. 23.

[71] Actualités Sociales Hebdomadaires, n° 1966, 15 mars 1996, p. 26.

[72] “Le comité d’éthique rend un avis mesuré sur l’autisme”, Actualités Sociales Hebdomadaires, n° 1960, 2 février 1996, p. 31. “La prise en charge des personnes autistes en France”, Avis n° 47-CCNE.

[73] “Vers une reconnaissance de l’autisme comme handicap spécifique ?”, Actualités Sociales Hebdomadaires, n° 1962, 16 février 1996, p. 5. Signalons à propos de cette lecture des débats parlementaires un exercice similaire effectué par Claude Veil : “Exercice méthodologique à propos des débats préparatoires à la loi d’orientation en faveur des personnes handicapées”, Bulletin de Psychologie, 423, XLIX, 1995-1996, 4/8, pp. 262-269.

[74] Assemblée Nationale. Compte rendu analytique officiel. Séance du jeudi 22 février 1996. 14 p. Ici p. 1.

[75] id., p. 2. Dans son article “Les dispositifs d’accueil des autistes vont être améliorés”, (Le Monde, 22 février 1996, p. 8), la journaliste Laurence Folléa reprend cette erreur et informe de « la découverte du syndrome par le psychiatre américain Leo Kanner, en 1947 [sic] ».

[76] id., p. 3.

[77] id., p. 4.

[78] id., p. 5.

[79] id.

[80] id., p. 6. C’est aux USA, dans l’état de la Caroline du Nord que la méthode TEACCH d’Eric Schopler est appliquée à la plus grande échelle.

[81] id., p. 7.

[82] Compte rendu intégral, Séance du jeudi 13 juin 1996, n° 56 S., vendredi 14 juin 1996.

[83] Union Nationale des Associations de Parents d’Enfants Inadaptés.

[84] Sénat, p. 3688.

[85] id., p. 3692.

[86] id.

[87] id., p. 3694.

[88] id., p. 3691.

[89] id., p. 3699.

[90] id., p. 3698.

[91] id., p. 3691.

[92] id., p. 3693.

[93] id., p. 3687. On lit ici une référence aux travaux d’un de ses prédécesseurs, initiateur des lois de 1975 : René Lenoir, Les exclus. Un français sur dix, Paris, Le Seuil, 2° ed. revue, 1974.

[94] id., p. 3702.

[95] id., p. 3697.

[96] id., pp. 3707 et 3708.

[97] E. F. : “Les députés reconnaissent l’autisme comme un handicap”, Libération, 23 février 1996, p. 14.

[98] “Réactions après l’adoption de la proposition de loi sur l’autisme”, Actualités Sociales Hebdomadaires, n° 1964, 1° mars 1996, p. 26.

[99] Béatrice Bantman : “Tollé autour de la loi sur l’autisme”, Libération, 4 mars 1996, p. 23.

[100] “Autisme : des équipes psychiatriques écrivent à Hervé Gaymard”, Actualités Sociales Hebdomadaires, n° 1965, 8 mars 1996, p. 23.

[101] Roger Misès : “Autisme. La nouvelle législation”, La Lettre de Psychiatrie française, n° 53, mars 1996. Ici p. 3.