CONVENTION NATIONALE

DISCOURS PRONONCÉ PAR LE CITOYEN CHAUMETTE, AU NOM DE LA COMMUNE DE PARIS

Le décadi 30 Pluviose, l'an II de la République française, une et indivisible, à la fête célébrée à Paris, en réjouissance de l'abolition de l'Esclavage

Imprimé par ordre de la Convention Nationale

Lien vers la présentation d'Olivier Douville

Saepe in magistratum scelera redierant sua

Sénèque, in Thyeste

Du moment où les hommes commencèrent à s'écarter des lois de la nature ; du moment où ils cessèrent de voir dans leurs vieux pères autant de lois vivantes auxquelles ils devaient religieusement obéir ; de ce moment, dis-je, on vit commencer la fatale époque de la dégradation et de l'avilissement de l'espèce humaine. L'intérêt, l'orgueil, l'avarice et la dureté ouvrirent bientôt la porte à tous les fléaux, qui, dans la suite firent regarder le premier bien pour l'homme, la sociabilité, comme le plus grand de tous les maux. Les mœurs primitives une fois altérées, la division entra dans les familles ; l'audace et l'injustice remplaçant les décisions patriarcales, la force prenant la place de la raison, l'avidité, la soif exclusive des jouissances ayant donné naissance au mien et au tien, il fallut des lois pour régler les différends ; il en fallut même de terribles. Alors on eut besoin de bras pour les faire exécuter. On ne pouvait qu'avoir recours aux plus forts, mais les plus forts se réunirent, et au lieu de d'employer leur puissance à protéger la faiblesse, ils en usèrent pour la soumettre, non aux conventions de la société, mais à leurs décisions arbitraires. Ainsi de l'autorité légitime naquit l'empire absolu : tant les hommes, toutes les fois que leurs passions font taire leur raison, sont aptes et prompts à gâter les meilleures institutions [1] !

L'arbitraire ayant pris naissance, la force dut nécessairement devenir la loi suprême ; le crime et tous les débordements qui marchèrent à sa suite, durent étouffer jusqu'à l'idée des vertus primitives ; la faiblesse dut aussi devenir un tort impardonnable aux yeux des plus forts, et un motif pour être tourmenté par eux ; mais le faible, de son côté, se voyant à tout moment dépouillé du fruit de ses sueurs par ses nouveaux maîtres, cessa de travailler, parce qu'il cessait de jouir. Le courage lui manqua ; son âme abattue n'eut bientôt de sensations que pour la douleur : il fut asservi … Oh ! qu'il dut être cruel, le barbare qui, le premier, chargea son frère de fers ! Comment put-il être témoin insensible de la première agonie d'une âme libre ! …Comment ses entrailles ne frémirent-elles pas à l'aspect de la douleur qu'il faisait éprouver à son semblable !… Son semblable! chez qui il voulait tuer l'homme : ô nature ! tu as interverti l'ordre de tes immortels décrets, lorsque tu fis le premier tyran. Tu lui mis sans doute un caillou dans la poitrine à la place d'un cœur… Mais que dis-je ? Ah ! pardonne. Non, non, tu ne fis jamais de tyrans ; tu fis, au contraire, l'homme bon et sensible ; l'homme seul s'est fait méchant, et il n'est devenu tout-à- fait méchant que lorsqu'il a cessé de t'entendre, de t'obéir.

Telle est, si je ne me trompe, citoyens, telle est l'origine de l'esclavage ; telle est la source cachée dans l'abîme des siècles de ce torrent dévastateur, qui, roulant d'un pôle à l'autre, engloutissait les générations, et menaçait la terre désolée d'un cours incalculable. Mais qui peut sonder les profondeurs de la vérité éternelle ? La méchanceté, la tyrannie, peuvent bien s'opposer à ses progrès pendant quelques instants (et les siècles sont des instants dans l'éternité), mais aux éclairs faibles et rares qu'elle lance à travers la nuit des législations absurdes et tyranniques, on peut reconnaître son existence ; et le juste, l'ami de la vertu, peut prophétiser ses merveilles aux mortels ensevelis dans l'espèce de brume des erreurs qui succèdent aux erreurs.

Apaisez-vous, mânes irritées de cent mille générations détruites par l'esclavage ; apaisez-vous, le jour de la justice a lui sur un coin du globe ; l'oracle de la vérité s'est fait entendre du sein d'une assemblée de sages, et L'ESCLAVAGE EST ANÉANTI. Le réveil d'un grand peuple doit produire de grands résultats. De même que la foudre purifie l'air des miasmes impurs qui l'infectent, écrase les pyramides orgueilleuses qui attestent les erreurs et les craintes de l'antiquité la plus reculée, dissipe les nuages épais qui dérobent aux mortels l'éclat de l'astre du jour, et occasionne, dans l'ordre naturel, un ébranlement prolongé, salutaire à tout ce qui respire ; de même le réveil d'un grand peuple doit, créant les mêmes effets dans l'ordre social, raviver tout ce qui le compose, et ressusciter, pour ainsi dire, ses éléments, pour les mettre, par ses efforts, dans un équilibre parfait. Ce mouvement se fait sentir, races passées ! …

Les héritiers de vos malheurs en sont étonnés ; mais ils vont jouir, et les larmes d'attendrissement que répandront les libérateurs et les délivrés, seront pour eux la douce rosée qui accompagne l'aurore d'une nouvelle vie.

Nations depuis longtemps effacées de dessus le globe, vous princes, tyrans, rois, archontes, sénateurs, juges, magistrats, grands ! vous que la nature a peut-être ramassés et confondus ensemble dans ce tourbillon de poussière que le vent emporte… dites, qui vous a pu conférer le droit atroce de détruire l'homme dans l'homme, d'opposer la nature à la nature… d'établir enfin l'esclavage ? Ah ! votre réponse est écrite sur ces ruines éparses, l'asile du reptile venimeux et de l'oiseau nocturne : votre réponse est dans votre propre destruction et dans sa cause ! La soif des jouissances exclusives, l'amour de la tyrannie, et le luxe qui pourrit le cœur.

Et vous dont le génie est immortel, vous échappez à la destruction des hommes de vos jours, législateurs, poètes, historiens, dont les feuilles savantes surnageront peut-être au-delà des temps, pourquoi ne nous dites-vous rien sur l'origine, sur le droit affreux de l'esclavage ? Plus près de la vérité que vos contemporains, pourquoi ne leur avez-vous pas découverte ? pourquoi ne l'avez-vous pas fait tonner pour épouvanter vos maîtres ? Et toi, sublime esclave d'Épaphrodite, ô Épictète [2] ! tu n'as rien dit non plus, tu t'es contenté de présenter à tes compagnons d'infortune la consolation d'une morale pure, il est vrai ; mais qu'est-ce qu'un remède qui ne détruit pas la cause du mal ? Eh ! quoi, pourra dire le disputeur insensé, cet embarras de tous les écrivains tant anciens que modernes ne pourrait-il pas prouver ? … Blasphème ! non, citoyens, non : cet embarras prouve tout au plus que les hommes de génie eux-mêmes attachés à la chaîne universelle, étaient du côté des victimes de l'oppression ; heureux, s'ils n'étaient pas du côté des oppresseurs !

Quelle que soit l'antiquité d'un crime, cette antiquité ne peut jamais prouver autre chose, sinon l'asservissement de ceux qui gouvernent, soit à leurs passions, soit à leurs tyrans. Eh ! quelles autorités, pour les opposer aux droits sacrés de la nature !!! Oui, tant que le jour sera le jour ; tant qu'un cercle sera un cercle, ces deux mots, homme, esclave, ne présenteront jamais à l'esprit que l'histoire de la violation de tous les principes, la série de tous les crimes qui peuvent entrer dans le cœur humain ; enfin, deux idées incompatibles, et par conséquent destructrices l'une de l'autre [3].

Si j'avais besoin de prouver ici que l'esclavage est aussi opposé au droit civil, qu'il l'est au droit naturel, il serait bien facile de démontrer que l'état civil d'un homme n'est tel que par la loi, et qu'un esclave n'étant point dans la société, ne peut être atteint par aucun institut. Mais tout est prouvé pour un peuple qui met à la tête de toutes ses décisions, comme à la tête de sa législation, la déclaration des droits de l'homme.

Eh ! que servirait d'ailleurs cet étalage de preuves ? serait-ce pour convaincre le tigre qui dévore les peuples africains et asiatique ? Serait-ce pour convaincre le marchand d'hommes dont l'âme racornie n'est plus sensible qu'à l'intérêt pécuniaire ? Mais, grâce à la révolution, nous sommes à-peu-près délivrés de cette espèce dégoûtante d'animaux carnassiers qui se nourrit de sang, de larmes et d'or ; et s'il en existait encore, à coup sûr ils ne peuvent qu'être fiers du titre de Républicains. Eh bien ! je pourrais les faire rougir, s'ils en sont encore susceptibles, en leur montrant l'âme d'un roi plus sensible que la leur ! l'âme d'un Louis XIII, répugnant à commettre le crime de l'établissement de l'esclavage dans les colonies ! car il fallut que les prêtres (eh! quels maux n'ont ils pas provoqués ?) lui persuadassent que l'esclavage des Nègres était le moyen le plus sûr de les faire chrétiens, c'est à dire sauver leur âme en détruisant son essence, la liberté, et leur procurer le paradis, en leur faisant essuyer ici-bas toutes les tortures de l'enfer [4].

Que si j'avais à convaincre des politiques, je pourrais non seulement à l'aide de Rousseau et de Montesquieu [5], prouver que tout ce qui est mal en soi, ne peut être bon en aucune circonstance de la législation, et que si l'esclavage est un mal, par cela seul il doit être proscrit par tout bon gouvernement [6]; que pour conserver des esclaves dans un pays peuplé de citoyens, il faut des lois de sang, et qu'un législateur prudent doit prévenir le malheur de devenir un législateur terrible.

Sans parler ici du danger et de la folie de l'esclavage dans les états démocratiques ; je pourrais citer l'histoire de tous les peuples qui ont eu des esclaves, et peindre les tourments du gouvernement, tantôt pour les maintenir sous un joug souvent secoué, et diminuer (ô forfait!) leur trop grande population ; tantôt pour restreindre la cruauté des maîtres : je citerais les lois succèdant aux lois, les règlements aux règlements ; aujourd'hui des décrets humains, et demain le Sénatus-consulte syllanien [7]. L'inquiétude générale de ces états, dans les soubresauts d'une législation fiévreuse, les mouvements toujours renaissants, les guerres serviles comparées par Florus [8] aux guerres puniques ; enfin le germe de la destruction des nations dans le foyer de corruption qu'entraîne la tolérance même de l'esclavage. Je pourrais faire sentir l'incohérence choquante des lois sur l'esclavage (si l'on peut appeler lois ce qui consacre un crime contre nature), opposer la législation de Sparte [9] à celle d'Athènes [10], la législation de Carthage à celle de Rome, les lois Mosaïques [11] à celles de la Tartarie et du Japon ; analyser leurs divagations, leurs oppositions sur un même sujet, et en tirer l'induction que toutes les fois que l'on s'écarte des principes de la vérité, on s'embarque sur un océan de ténèbres, et que tous les efforts que l'on fait pour s'y guider ou s'y maintenir, ne servent qu'à provoquer inévitablement la perte la plus prochaine… Mais les temps sont passés où les nations, composées de brigands et d'esclaves, d'animaux féroces et d'animaux imbéciles, n'offraient à l'œil épouvanté que l'horrible spectacle de la dégradation de l'espèce humaine endormie dans le crime, se réveillant quelquefois dans la crime, et finissant par se perdre dans le crime.

Je parle ici à des citoyens tous convaincus de cette vérité, que l'esclavage est le plus grand des maux, et son abolition le plus grand des biens, tant pour les états que pour les particuliers : pour les états, en les préservant de ces agitations violentes qui hâtent leur chute : pour les particuliers, en les préservant de la contagion de tous les vices qui naissent de l'esclavage qui éteint les hommes !… L'esclavage qui éteint les hommes !… Idée accablante et trop vraie ! que n'as-tu frappée l'âme de ces législateurs que l'histoire nous cite avec tant d'orgueil ! que n'ont-ils proscrits jusqu'au mot d'esclave ! Hélas ! si vous n'aviez été peuplées que de citoyens égaux et libres, peut-être vous existeriez encore, magnifique Palmyre [12] ; et vous Thèbes, [13] la première des cités ! vous existeriez peut-être encore, antiques Persans, dont la population immense s'étendit de l'Indus [14] à la Méditerranée 8 mais, instruments de la tyrannie, et tyrans vous-mêmes, vous aviez dans vos usages et vos lois le principe de votre anéantissement. Les homes, chez vous, étaient divisés en deux parts, celle qui commande et que l'on haït, et celle qui obéit et ne pardonne jamais [15].

Attaqués par de véloces et de nombreux voisins, vous avez armé vos esclaves ; ET vous n'avez opposé que des remparts de cadavres à l'intrépidité des vainqueurs ; ET bientôt moissonnés vous-mêmes par la flèche rapide qui ne choisit pas sa victime, entassés sur vos esclaves étendus, vous avez abreuvé de votre sang cette même terre qu'ils arrosaient hier de leurs sueurs et de leurs larmes, pour al forcer à vous prodiguer ses trésors ; ET vos cités bouleversées ne sont plus qu'un amas de décombres qui n'ont d'autres ciments pour les lier entre elles, que la ronce que déchire le pied du voyageur ; ET vos ports comblés, vos temples renversés, vos palais détruits, l'éloquent silence des tombeaux succédant au murmure de la vie sociale, attestent aux générations qui vous survivent les outrages que vous fîtes à la nature, en consacrant chez vous l'esclavage, et la vengeance terrible qu'elle sut en tirer, en combinant contre vous, dans ses calculs infinis, tous ses grands moyens de destruction.

Où sont-ils les remparts sacrés de Lacédémone [16], les portiques d'Athènes [17], les flottes de Tyr, les immenses travaux de Sydon [18], les temples de Persépolis [19] ? où sont-ils ces immenses troupeaux de Memphis [20] ? Qu'est devenu ce monde de laboureurs, de pasteurs, d'artistes, de matelots, de guerriers ? ô terres désolées et veuves d'habitants, ruines mousseuses, vous n'offrez plus à mon imagination effrayée que la vaste urne cinéraire de cent peuples détruits, sur laquelle la nature a gravé, de ce doigt qui ouvre les entrailles de la terre et remue les éléments, votre épitaphe en trois mots : ESCLAVAGE, CORRUPTION, DESTRUCTION.

Mais sans aller interroger les tombeaux des anciens, sans aller dans la nuit des temps déterrer les funestes effets de l'esclavage ; sans même nous arrêter sur les premiers siècles de la France esclave, sous le système de la féodalité et de la servitude personnelle, fixons un moment nos regards sur des faits beaucoup plus près de nous. Suivons dans sa course impie ce vaisseau négrier qui, semblable au Taureau de Phalaris [21], doit consumer tant de victimes humaines. Voyons-le aborder la côte d'Afrique, et vomir sur des rivages jadis heureux, l'art infernal de diviser les hommes, de les tenir continuellement en guerre, afin d'acheter leurs prisonniers pour des liqueurs fortes qui empoisonnent les vainqueurs. Voyons les plus belles contrées du monde habitées par un peuple doux par essence, et transformé, par l'esclavage, en un ramas de fauves occupés, grâce aux ressources Européennes, à se déchirer impitoyablement, à se charger de fers et se venger tour à tour, pour se voir ensuite transplanter dans des contrées inconnues, y subir le sort des bêtes de somme, et ne voir la fin de tant de maux que sous la tombe. Suivons l'aride marchand d'hommes dans toutes ses opérations ; voyez-le entasser ses victimes les unes sur les autres dans un espace étroit, infect, étouffé ; meurtrir sous les sinuosités d'une corde goudronnée, le sein encore plein de lait ; voyez la jeune épouse arrachée à son époux, à ses enfants, qui sont déjà morts, privés des soins maternels ; entendez les gémissements de ces infortunés [22] appelant la mort à toute minute marquée pour eux par un supplice nouveau ; voyez-les … Mais quittons ce gouffre destructeur, et débarquons avec le reste de ces pauvres esclaves assez malheureux pour avoir échappé à la maladie ou au désespoir qui a moissonné le moitié des leurs.

Si nous débarquons dans quelques-unes des Antilles, qu'y verrons-nous ? des Portugais énervés de mollesse, dont l'aspect nous rappellera la sanglante origine de l'esclavage dans ces contrées. Les étaux des bouches où furent mis en pièces les restes des Mexicains, pour servir de pâture aux chiens des vainqueurs, viendront se peindre dans notre pensée et nous faire frémir d'horreur : si nous débarquons à la Guadeloupe ou à Saint-Domingue, nous y verrons une longue suite d'esclaves courbés d'un soleil à l'autre sur un sol brûlant, et sous le fouet d'un piqueur inhumain, invoquer tout bas la mort ou bien la Liberté [23] ; quelques-uns, au retour des ombres, s'entretenant (toujours assez bas) des bords qui les ont vu naître, poussant des soupirs vers le ciel, et appelant en vain un libérateur … hélas ! et si par hasard, ils sont entendus, que de douleurs ! … Mais rassurez-vous, citoyens ; non, je ne vous peindrai pas les tortures qu'ils ont à souffrir ; il faut l'imagination d'un Louis XI pour pouvoir s'appesantir sur de pareils détails : hélas ! ils ne sont que trop connus !… Ils ne pleurent plus, les malheureux nègres ; il y a bien longtemps que la dernière larme a rafraîchi leur paupière desséchée : heureux encore, si dans leurs cœurs nés pour aimer avec énergie, toutes les passions n'ont pas fait place à la haine fortement prononcée. alors leur pensée active et bouillante devient l'atelier de tous les crimes ; aussi prompts à se communiquer leurs desseins qu'habiles à les exécuter, ils vont ravager toute une contrée, pour ensuite périr eux-mêmes sur les débris qu'aura fait naître une rage trop longtemps concentrée.

Voyez-vous ces gros tourbillons de flamme et de fumée ! Eh bien ! c'est le théâtre de la plus affreuse de toutes les guerres. Dix mille esclaves, vingt mille maîtres, sont armées ; l'incendie et la dévastation indiquent les traces horribles des combattants ; la terre est jonchée de cadavres : rien en rétrécit la fureur de part ni d'autre ; c'est la guerre de la vengeance, elle est terrible !… Eh Dieu ! pourquoi donc tant de crimes, tant de malheurs, tant de tourments, tant de fléaux, tant de carnage, tant de sang ? pourrions-nous le croire, si l'expérience ne le prouvait tous les jours ; c'est pour satisfaire à l'insatiable cupidité de quelques familles européennes qui dépeuplent , ravagent les deux tiers du monde connu, afin de fournir aux autres portions, qu'ils soumettent encore à leur comptoir, quelques superfluités.

Parlez à ces êtres là , des lois sacrées de la nature, des principes de la civilisation, des droits imprescriptibles de l'homme : ils vous répondront froidement : c'est mon commerce … Et malheureux ! Mandrin et Louis XIV, Charles IX et Desrues avaient aussi leur commerce. Réponds, si tus as une conscience, était-il légitime ?

Parlez-leur, avec l'accent de la pitié, des maux qu'occasionne l'esclavage à ceux qui le tolèrent et à ceux qui en sont les victimes ; peignez-leur tous les dégâts dont il est la cause ; et ils vous répondront en accolant quelques chiffres : << Trois cent mille esclaves, à mille livres, l'un portant l'autre, font trois cent millions que l'on perdra,…et∞ >> Arrête, n'achève pas d'outrager la nature en ma présence ; …je ne veux pas te répondre ; mais je dirai à ma patrie : Ces trois cent mille esclaves, qui n'ont jamais pu être achetés ni vendus formeront une armée de trois cent mille hommes invincibles, puisqu'ils se battront pour leur liberté et pour celle d'un pays qui sera leur.

Les Colonies françaises, ravagées par les différents partis qui se les sont disputés, trouveront tout à coup trois cent mille cultivateurs intéressés à leur prospérité. L'esclave n'a ni bras ni pensée ; c'est une machine mise en mouvement malgré elle : l'esclave, devenu libre, retrouve des bras, une raison, un cœur reconnaissant ; toutes ses facultés se doublent, et ils les consacre à patrie… Pardon, citoyens, si je me suis trop appesanti sur les maux dont l'esclavage a été la source. J'ai cru que, pour mieux sentir toute la grandeur du bienfait de sa destruction totale, il était bon de nous entretenir de toutes ses horreurs. Nous l'avons vu, comme un vaste cancer, couvrant le globe entier de ses ramifications venimeuses, empoisonnant tantôt l'un, tantôt l'autre hémisphère, quittant une contrée totalement ravagée, pour porter la désolation dans une autre, puis revenir à la première après sa repopulation ; nous l'avons vu étendant sur le monde antique, les crêpes de la mort : mais aujourd'hui le tocsin de la justice éternelle a sonné, les paroles sacramentelles ont été prononcées par l'organe d'un Peuple puissant et bon : L'ESCLAVAGE EST ABOLI.

Est-ce ta voix, ô nature ! est-ce ta voix qui vient de se faire entendre ; si les voûtes du temple des lois n'ont fait que lui servir d'écho ? Ministres de la morale des nations, heureux législateurs, vous l'avez prononcé ce décret immortel : il est déjà votre récompense. Entendez-vous ce concert d'actions de grâces, ces cris d'allégresse et de bénédiction, partis du milieu de ce esclaves dont vous venez de briser la chaîne. Les voyez-vous ces hommes, la joie peinte sur al figure, bondir comme le jeune Faon en criant Liberté ! et courir raconter leur bonheur à toute la nature ? Ils le disent aux arbres, aux rivières, aux montagnes . Eh oui ! semblable à l'éclair électrifié qui parcourt en un clin d'œil l'espace incalculé, l'oracle que vous venez de prononcer sur les rives de la Seine, va bientôt retentir de la cime des Cordillères [24],… dans les antres glacées de la Sibérie [25]Mais que vois-je ? … hommes noirs !… la flèche homicide entre vos mains ! … Bientôt elle va, signal de la guerre, parcourir toutes les habitations de la contrée ; le sang va couler encore … Arrêtez, gardez cette flèche pour le Gesler [26] anglais ou espagnol qui tenterait de vous asservir. Arrêtez, il n'y a plus dans le pays que vous habitez, ni maîtres durs à punir, ni esclaves à délivrer ; vous êtes tous égaux. Oui, tous égaux !…Voyez-vous les fruits noirs du Troène (Kenna) [27], mêlés aux bouquets blancs de l'oranger ? Le soleil éclaire, vivifie l'un et l'autre sans distinction, et ce mélange forme un spectacle enchanteur : eh bien ! voilà désormais votre destinée. Allez maintenant, allez sur les tombeaux de vos pères immolés à l'avidité des nôtres ; formez des chœurs, oubliez avec les romances plaintives de vos Guyriots [28], toutes vos peines, tous nos torts et les vôtres ; ne songez plus qu'à votre bonheur. Entonnez des chants de liberté ; que votre cri de ralliement soit désormais France et Convention nationale. Ah ! surtout recueillez précieusement les cendres de votre fidèle ami, du courageux Ogé. Le premier il osa vous parler de liberté ; fort de toute la force que donnent la vertu et la conscience d'un homme libre, le premier il osa braver la tyrannie. Vainqueur sans cruauté, il fut vaincu sans montrer de faiblesse, et mourut en grand homme. Sur l'échafaud même, son port majestueux et sa force d'âme semblaient commander à de vils bourreaux. Dressez lui, hommes nouveaux, dressez lui un monument simple comme vos cœurs ; suspendez y pour trophées tous le infâmes attributs de l'esclavage passé ; gravez y, pour apaiser son ombre, ces mots qui sont le gage de votre félicité : DECRET DE LA CONVENTION NATIONALE QUI ABOLIT L'ESCLAVAGE. Et toi, cendre d'Ogé, cendre respectable et chérie, reçois, de la part d'hommes libres, le juste tribut d'éloges que méritent les grands efforts que tu fis, et les mâles vertus que tu déployas : attends en paix que la nation, dont tu fus l'interprète hardi, ait elle-même prononcée, sur ta vie et tes travaux, son irrévocable jugement.

Pour nous, citoyens, réunis aujourd'hui pour célébrer une des plus belles époques de notre révolution, gardons nous de prévenir, par des vœux indiscrets et précipités les décisions de nos législateurs pour l'exécution de la loi dont nous venons de parler ; craignons que trop d'empressement ne retarde encore le bonheur de nos frères de couleur ; attendons avec confiance l'effet des mesures sages que doit prendre le gouvernement pour préparer des yeux affaiblis, aux torrents de lumière qui vont les frapper ; craignons qu'une ivresse hâtive ne s'empare avec trop de violence de ces hommes tout neufs pour la liberté, et n'excite encore parmi eux des mouvements qui pourraient être funestes, et à eux, et à nous. C'est au pilote qui ordonne la maneuvre du vaisseau à la diriger et à la suivre à l'œil. Ah ! croyez que la Convention nationale est aussi impatiente que vous de jouir du spectacle d'un monde d'heureux. Reposons nous donc sur son expérience et sa sollicitude paternelle, du soin de répondre par des faits authentiques aux arguments des ennemis de la liberté des Noirs ; contentons nous de chanter la nouvelle victoire qu'elle vient de remporter sur d'antiques préjugés. Célébrons les desseins éternels de la nature dont elle a constamment été l'organe ; fêtons dans la personne des Représentants du peuple, députés des colonies, nos frères qu'ils ont laissés au-delà des mers, dans l'attente du plus grand de tous les biens, et jouissons par anticipation du plaisir qu'ils éprouveront à leur annoncer la bonne nouvelle ; enfin, que cette journée soit consacrée à chanter l'égalité et la liberté … VIVE L'ÉGALITÉ ! VIVE LA LIBERTÉ !

DE L'IMPRIMERIE NATIONALE

[1]Utque antehac flagitiis, tunc legibus laboratur, Tacit, Ann. lib. 3

[2] Épictète naquit à Hiéropolis, ville de Phrygie. On ne connaît pas bien son véritable nom. Celui qu'il porte, Épictète,signifie esclave, serviteur. Il était esclave d'Épaphrodite, l'un des favoris ou des gardes de Néron. Épictète était un stoïcien parfait. On a de lui un des meilleurs livres de morale qui existent, connu sous le titre de Manuel d'Épictète. Il réduisait totue sa philosophie à ces deux mots : Souffre, abstiens-toi. Son maître, Épaphrodite, jouant un jour avec lui à la manière des maîtres, c'est à dire avec brutalité, Épictète lui dit plusieurs fois: Finissez, vous me casserez la jambe. Mais Épaphrodite ayant continué, il la lui cassa (encore était-il boîteux de cette jambe dès sa jeunesse). Je vous l'avais bien dit que vous me casseriez la jambe, dit froidement Épictète, la voilà cassée. Une de ses maximes favorites était celle-ci : Avant de te présenter au tribunal des juges, présente toi à celui de la justice. Ce philosophe nous a laissé toute son histoire dans ce peu de mots : << Je suis Épictète, esclave, estropié, un autre Irus en pauvreté et en misère, et cependant aimé des dieux>>. Il mourrut sous l'empire de Marc-Aurèle. La lampe dont il s'était servi dans ses travaux nocturne, fut vendue trois mille drachmes.

[3]<<De quelque sens qu'on envisage les choses, le droit d'esclavage est nul, non seulement parce qu'il est illégitime, mais parce qu'il est absurde et ne signifie rien" J. J. Rousseau, Contrat Social, livre 1, chapitre 4.

[4] Voyez le P. Lebat, nouveau Voyage aux îles de l'Amérique. Tome 4.

[5] << Il me semble que quelques pénibles que soient les travaux qu'exige la société, on peut tout faire avec des hommes libres>>. Montesquieu, livre 15, tome 1.

[6] << Il (l'esclavage) n'est pas bon par sa nature ; il n'est utile ni au maître, ni à l'esclave : à celui-là, parce qu'il contracte avec ses esclaves toutes sortes de mauvaises habitudes ; qu'il s'accoutume insensiblement à manquer à toutes les vertus morales ; qu'il devient fier, prompt, dur, colère, voluptueus, cruel… Dans les démocraties, où tout le monde est égal, des esclaves sont contre l'esprit de la constitution ; ils ne servent qu'à donner aux citoyens une puissance et un luxe qu'ils ne doivent point avoir >>. (Indélabes). Montesquieu. Tome I, livre 15, chapitre 4.

[7] Ce Senatus-Consulte porte que lorsqu'un maître serait tué, tous les esclaves qui se trouveraient sous le toît, et logès dnns un lieu assez près de la maison pour qu'on pût antendre la voix d'un homme, seraient massacrés ; que ceux qui, dans ce cas, réfugieraient un escalve pour le sauver subiraeint la peine des meurtirers ; que lorsqu'un maître serait tué dans un voyage, on punirait de mort les esclaves qui auraient fui d'auprès de lui, et ceux qui y seraient restés.

[8] Florus, livre 3.

[9] À Lacédémone, les esclaves ne pouvaeint se plaindre des insultes et des mauvais traitements qu'ils éprouvaient tous les jours ; ils étaient non seulment esclaves d'un homme, mais de toute la cité.

[10] À Athènes, les lois sur l'escalvage étaeint beaucoup plus douces. On punissait sévèrement quiconque frappait l'escalve d'uatrui.

[11] <<Si quelqu'un, dit Moïse, frappe son esclave et qu'il meure, il sera puni (Il ne dit pas comment). Mais si l'esclave survit un jour ou deux, le maître ne sera pas puni, parce que c'est son argent …>> C'est son argent !!!

[12] Une des plus grandes, des plus riches et des plus belles villes de l'antiquité, dont il ne reste plus, près les rives de l'Oronte en Syrie, dans la contrée appelée le Désert, qu'un amas immense de ruines qui présentent, par la beauté des corniches et des colonnes renversées, une idée de la grandeur et de la science de ses habitants

[13] Thèbes . Hécatompylos. Les régnets de collège traduisent ce mot par cent portes ; mais les républicains plus instruits disent cent palais. Cette ville était la capitale de la Béotie. Elle fut ruinée par le brigand Alexandre. Les poètes nous dit qu'elle fut ceinte de murailles par Araphion. Elle eut deux célèbres capitaines, Épaminondas et Pélopidas. C'était la patrie du poète Pindare. La fable y fait naître les deux Bacchus et Hercule. Il y avait plusieurs villes de ce nom, toutes célèbres et toutes détruites, ou réduites à de malheureux villages.

[14] Le plus grand de tous les fleuves de l'Asie, et qui a donné son nom à l'Inde qu'il arrose. L'histoire rapporte qu'Alexandre mit cinq mois dans sa navigation sur ce fleuve, quiqu'il fit au moins six cent stades par jour. Il prend sa source au mont Péropannissans, près le Caucase.

[15] Motus et terror est, infirma vincula caritatis, quedi removeris, qui timere desierent, odisse incipiens.

[16] Ou Sparte, ville ancienne du Péloponèse, sur les bords de l'Eurotas. Lycurge fut son législateur. L'amour de la patrie, les vertus répiblicaines, le respect pour les dieux et les vieillards étaient la base des mœurs de ses habitants. C'est de Lacédémone que sont sortis les plus grands capitaines : et cette ville n'est plus !

[17] C'était la capitale de l'Attique. Elle eut pour législateur Solon. Une grande douceur dans les mœurs, un goût exquis et un grand respect pour les beaux arts, formaient le caractère principal de ses habitants. Poètes, orateurs, historiens, guerriers, elle avait tout, et rien de médiocre dans ce qu'elle avait. On voyait dans Athènes les plus beaux édifices du monde. Elle fut dans l'antiquité la pépinière, le rendez-vous et l'école des grands hommes dans tous les genres. Elle n'est plus !

[18] Ville très ancienne de la Phénicie, située autrefois sur les bords de la mer. Cette ville était fameuse par ses immenses ateliers.

[19] C'était jadis le capitale de toute la Perse. Les temples du soleil ou Mithras, dont je parle ici, étaient de superbes plaines plantées d'arbres fruitiers de toute espèce, arrosées par des sources d'eau vive, et ornées des plus belles fleurs. Alexandre étant ivre (ce qui lui arrivait souvent) fit détruire cette ville, pour venger, disait-il, les Grecs, tandis que lui-même les asservissait.Le dieu Mithra ou Mithras, qui n'est autre chose que l'Adonis ou Adonaï des Phéniciens, l'Atys des Phrygiens, le Bacchus des Grecs et l'Osiris des Égyptiens, était connu sous l'emblème de l'agneau ou bélier, rédempteur, sauveur, expiateur. C'était, selon Jean, l'un des initiés, la lumière qui éclaire tout œil s'ouvrant dans le monde. Le dieu Mythra de Persépolis était né, comme le Christ de Hiérusalem, le 25 décembre ; et tous les ans à pareille époque, à l'heure de minuit, au moment où la constellation de la Vierge monte sur l'horizon, l'on célébrait l'anniversaire de cette naissance mystérieuse. La constellation de la Vierge était dessinée dans toutes les sphères anciennes sous les traits d'une jeune vierge allaitant son enfant, qu'on appelait Iesous (Isis.)Voyez Porphyre . De mysteriis AEgyptium, Boulanger, de l'Ant. dévoilée; des Mémoire de l'acad.

[20] Ville de l'Égypte, célèbre par ses édifices publics, mais encore plus par les immenses et superbes troupeaux d'Ogdoüs, l'un des sept rois

[21] Phalaris, tyran des Agrigentins, inventait tous les jours de nouveaux supplices qu'il faisait essayer sous ses yeux. Enfin, il fit construire, d'après les dessins de Peryllo, un taureau d'airain qu'on faisait rougir au feu pour y enfermer des hommes vivants, et flatter l'oreille du tyran par les cris affreux de ces pauvres victimes. Peryllo, l'inventeur de la machine infernale y fut jeté les premier (Avis aux inventeurs de torture). Mais Phalaris se rendit si odieux par ses cruautés, que le peuple indigné, le brûla à son tour, tout vif, dans le même taureau où il avait fait périr tant d'hommes (Avis aux tyrans).

[22] Ceux qui ne savent pas ce que c'est qu'un vaisseau négrier, pourront l'apprendre de M. Flaconbridge, dans son Tableau de la Traite des Nègres. Figurez-vous d'abord un espace dans l'entre-pont large de deux ou trois pieds, où les nègres sont entassés, dans lequel ils ne peuvent non seulement se tenir debout, mais pas même assis pour peu qu'ils soient grands. Ils y sont enchaînés deux à deux par les deux pieds et les deux bras, en sorte que l'un est toujours associé aux douleurs et à la maladie de l'autre. Dans cette situation, étouffés par une chaleur brûlante et fétide, ils se heurtent et s'ensanglantent continuellement au plus léger roulis du vaisseau. Là, ils éprouvent très souvent des maladies épidémiques, telles que la dysenterie et le flux du sang ; mais écoutons là-dessus le rapport d'un chirurgien cité pa Falconbridge. << Un grand vent nous ayant surpris, nous fûmes obligés de fermer nos sabords : alors la fièvre et le flux augmentèrent. J'allais souvent les visiter (les nègres); mais à la fin, l'atmosphère de l'entre-pont devint si fétide qu'elle était insupportable, au delà de trois minutes. Le plancher était si couvert de pourriture et de sang, qu'il n'était pas possible d'imaginer une situation si horrible et si dégoûtante. Un grand nombre des ces esclaves étaient sans connaissance. On les porta dans l'entre-pont où le plus grand nombre mourut >>. Un témoin oculaire écrivait à Court de Gébelin : << j'ai vu jusqu'où peut aller la barbarie européenne ; j'ai vu faire provision de poison pour étudier la révolte des noirs sur un vaisseau négrier ; j'ai vu faire usage d'instruments inventés pour les faire manger par force, après les avoir martyrisés par la question du palan ; mais malgré les extensions de membres et la flagellation la plus cruelle, j'en ai vu périr beaucoup opiniâtré à ne point manger, quoiqu'avec des cornes en entonnoir on leur versait par force des aliments liquides dans le gosier. Heureux sont ceux qui peuvent ainsi s'arracher par la mort à l'esclavage le plus affreux, et à des tyrans si féroces >>.

[23] Il n'est pas rare de voir des mères étouffer leurs enfants par tendresse et par pitié pour eux. Il est moins rare encore de voir des nègres avaler leur langue et s'étouffer ainsi. Cette manière d'avaler sa langue est même un art que tout le monde ne possède pas ; il se transmet en secret, comme l'initiation aux mystères de la délivrance.

[24] Ce sont les plus hautes montagnes du monde, selon les voyageurs ; elles sont situées dans le Pérou

[25] Tout le monde sait que le gouvernement russe fait périr par année plus de dix milliers d'esclaves dans les mines de la Sibérie, où on les emploie à extraire les métaux et les pierres précieuses, telles que l'aigue et le crystal de riche.

[26] Gesler, , gouverneur en Suisse pour l'Autriche, ayant dans un accès de despotisme, obligé Guillaume Tell à abattre avec sa flèche une pomme placée sur le tâte de son fils, celui-ci l'abattit. Mais une flèche cachée sous les vêtements de ce malheureux père, trahit ses intentions. A quoi bon cette autre flèche demanda Gesler ? Je la réservais pour toi répondit Guillaume Tell, si j'avais eu le malheur de tuer mon fils. Ce Gesler fut le premier scélérat qui cimenta, par sa mort, la liberté des Suisses, dont Guillaume Tell et ses braves compagnons furent les fondateurs

[27] Espèce de troène d'Afrique. Les négresses s'en servent pour teindre leurs ongles, et quelquefois leurs cheveux en rouge. Cette couleur reste souvent jusqu'à la nouvelle reproduction : ce qui a fait croire à quelques voyageurs qu'il y avait des femmes, africaines qui avaient les cheveux et les ongles rouges. Notre troène est un petit arbrisseau qui rapporte des baies noires, lesquelles servent à faire une jolie teinture violette.

[28] Guyriots, chansonniers nègres ; on leur attribue quelques romances madécasses, sans art, mais pleines de sentiment.