Mollie Make up Your Mind

Lee Morse (1897-1954)

Par Olivier Douville

Lee Morse (1897-1954) - 78t - New York - 1927-03-17, Columbia

Orchestre : Lee Morse (vocal) ; pianiste, cornettistes, tromboniste et clarinettiste inconnus

Avec Lee Morse la chanson populaire américaine des années 1920 se détire des bras de l’ingénuité et de la pose pour se sentir une faim canine d’humour et d’espièglerie. Aussi vit-on cette jeune femme pétillante et insolente croquer avec dilection et énergie quelques scies en vogue pour les marques Pathé et Columbia.

La famille Morse était de nature prolifique ; troisième fille d’une fratrie de douze enfants, la jeune Lee goûte aux joies du mariage à 18 ans et aux astreintes de la maternité, un an après. (Le lecteur peut ici intervertir les termes « joies » et « astreintes »). L’appel des planches est suffisamment fort pour l’extraire des stricts devoirs familiaux, et elle divorce peu après.

Sa verve, son charme aussi, les nuances de sa voix qui passe sans qu’on y prenne garde de l’ironie la plus incisive à la plus chatte de tendresses, bref, toutes ses qualités que galvanise l’énergie de ses vingt ans, lui assurent une estime immédiate et un succès rapide. Elle irradie quelques revues et signe des contrats d’enregistrement. Certains grands jazzmen ont joué avec elle, les mêmes qui aimaient accompagner la douce Annette Hanshaw étaient heureux de se mesurer à la flexibilité vocale, la musicalité et la parfaite mise en place de Lee Morse.

Si nous ne savons rien de qui l’accompagne dans «Mollie make up Your Mind », cette face ne peut que retenir notre attention tant la délicieuse et mordante Lee Morse y livre avec cette nonchalance pointilleuse qui est sa marque de fabrique, son propre sentiment de « swing » et l’empan de son style, mieux de son art. On la voit utiliser des façons de yoddle qu’on note aussi chez des bluesmen et blueswomen. C’est encore et surtout sa façon de jouer avec le tempo, d’y loger sa voix un peu en retrait qui donne à ce 78 tours son élan et sa beauté. Incontestablement Lee Morse était une femme d’esprit.

Olivier Douville