Lucius « Lucky » Millinder

Lucius « Lucky » Millinder (1900-1966)

Par Olivier Douville

Little John Special - 78t -Dizzy Gillespie, William Scott, Nelson Bryant (trompettes), George Stevenson, Joe Britton (trombones), Tab Smith, Billy Bowen (saxophones alto), Stattford Simon, Dave youing (saxophones ténor), Ernest Purce (saxophone baryton) , Bill Dodgett (piano), Nick Fenton (contrebasse), Panama Francis (batterie), Lucky Millinder (leader) - New York 29 juillet 1942 - Brunswick

Homme de scène, le chef d’orchestre Lucky Millinder, est , à peine ses vingt ans révolus le maître de cérémonies de plusieurs bals et clubs de musique de Chicago. Il sert de faire valoir à de nombreuses phalanges. Et pérégrine ainsi jusqu’à Monte Carlo, où, en 1933, il prend Bill Coleman comme compagnon de voyage.

Peu à peu, à la manière d’un amateur de puzzle, il construit son propre orchestre, autour du dernier contingent d’artistes du Mills Blue Rhythm Band et de Bill Dodgett, lequel fera ultérieurement une belle carrière d’organiste.

Animateur inlassable, Lucky Millinder, cet heureux homme n’a sans doute jamais enregistré une note de musique, mais poussait à son apogée l’art de savoir s’entourer.

L’âge d’or de son meilleur groupe est le début des années 1940. Swingante, nerveuse, souple, cette interprétation du très dansant thème « blues » Little John Spécial, met en valeur le jeu énergique et Tab Smith dont la fougue et le vibrato prononcé anticipent sur le style expressionniste des saxophonistes de Rhythm and Blues ou, même de Rock and Roll. Le solo suivant de Stattford Simon est solide et sans surprise. Le principal intérêt de ce disque réjouissant provient des 24 mesures qu’y prend le jeune Dizzy Gillespie. Son solo marque la fin des rodages, apprentissages et autres approximations acrobatiques et flamboyantes qui le fit remarquer dans les rangs des orchestre de Cab Calloway, ou, antérieurement de Teddy Hill. Dizzy pense avoir, à partir de ce solo, et pas avant, atteint un des buts qu’il s’était fixé : concilier la liberté et la fougue d’un Roy Eldridge avec la profondeur harmonique qu’il connaît bien, étant aussi pianiste.

L’arrangement du morceau, de la plume de Tab Smith, permet d’entendre, en arrière plan du solo du saxophoniste baryton, une courte phrase de quatre mesures issue d’un des thèmes fétiches du be-bop, Salit Peanuts (composé par Kenny Clarke et Dizzy Gillespie). Comme en un joyeux collage, l’oreille avertie décèle aussi une citation de deux morcexu antérierus de Coutn Basie : Swingin’ the blues et, pour la coda, One O’ Clock Jump. Le jeu de batterie de Panama Francis est superlatif.

Olivier Douville