Jimmy O’Bryant, « Charleston Fever »

Jimmy O’Bryant

Par Olivier Douville

O’Bryant’s Washboard band, juillet 1925

Jimmy O’Bryant Famous Original Washbaord Band: Jimmy O’ Bryant (clarinette); Jimmy Blythe (piano); Jasper Taylor (wasjboard); Bob Shoffner (cornet)

On ne sait trop quand est né Jimmy O’ Bryant. Lui même ne le su jamais, on retient la dernière année du XIX°siècle comme une possibilité. En revanche, nous savons trop bien à quel moment la mort s’en empara : trop tôt, alors qu’il était à peine âgé de trente ans. Les femmes aimaient sa compagnie, dit-on, pour ce qu’il en est des musiciennes ce n’est plus la peine de tenter de le prouver, tant sa présence régulière chez Lovie Austin, Julia Davis ou Getrude « Ma » Rainey nous rassure sur ce point. Trop vite décrit comme un doublon de Johnny Dodds, ce qui déjà n’est pas une mince affaire, O’ Bryant est bel et bien un des meilleurs clarinettistes des années 1920 tant lorsqu’il s’avance en solo que lorsqu’il brode variations et contrepoints dans un jeu collectif. Son attaque est ferme et le boisé de sa sonorité émerveillent encore. Avec « Charleston Fever » il n’est plus seulement question de savoir en quel endroit de la terre du blues, au sein de quelle famille d’instrumentiste, le talent de ce clarinettiste émergea et s’épanouit. Il apparaît que son émouvante fidélité au lyrisme de Dodds le porte à un art sans concessions. Nous pouvons hardiment affirmer qu’il fallait que l’essentiel des arguments musicaux de O’Bryant soient trouvés et mis en œuvre par Dodds et qu’il en vint à les accepter de lui, pour qu’il puisse devenir lui-même au sommet de son développement et de sa sphère d’activité. Cette face illustre cette vérité de transmission. Il se fait tout un entrelacement de références « bluesy », de vivacité rythmique, et d’abandon aussi dans ces quelques mesures de musique orléanaise. Ici encore, l’effet vital de l’influence de Dodds, loin de tout plagiat, permet de maintenir un équilibre et une justesse d’exécution peu commune. O’Bryant apprend d’elle l’art des proportions tout en se les prescrivant à lui-même, dans une grande autorité de construction. Bien entouré comme il l’est ici, son plaisir à jouer est évident et communicatif. Blythe apporte sa richesse rythmique et son sens du phrasé. Le cornettiste Shoffner, protégé du King Oliver a une façon enjouée et obstinée de poser avec une grande délicatesse les petites touches de son solo très chantant.

Olivier Douville