Choo Choo - Gotta Hurry Home

« Duke » Ellington

Par Olivier Douville

« Duke » Edward Kennedy Ellington (1899-1974) - 78t - 1924-11-00, Blue-Disc

Orchestre : The Washingtonians : Duke Ellington (piano, arrangeur, leader) ; Bubber Miley (cornet) ; Charlie Irvis (trombone) ; Otto Hardwick (clarinette et saxophone banjo) Fred Guy (banjo) ; Sonny Greer (batterie)

Le 29 avril 1899, naît Edward Kennedy Ellington, dans une famille aisée de la petite bourgeoisie.Son père était maître d’hôtel chez un médecin et travaillait parfois à la Maison Blanche (il dessinera plus tard des plans pour l’US Navy) ; sa mère jouait du piano à l’église.

D'où lui venu son surnom de "Duke" et qui colle si bien au raffinement et à l'allure d'Ellington ? à son incomparable sens de la distance chaleureuse, aussi. La version la plus connue et la plus répandue à ce jour serait que les copains d'enfance du jeune Ellington l'aient nommé ainsi en raison de ses manières et de son aisance.

Edward Kennedy Ellington, enfant de la petite bourgeoisie noire de Washington, commence son éveil artistique en passant en revue les arts décoratifs de son époque. Tout jeune, il est lauréat d’un concours organisé par le NAACP –National Association for the Advancement of Coloured People, association influente doublée de son organe de presse "The Crisis". Duke refuse cette allocation et se tourne vers la musique et, surtout le piano qu’il étudie avec Henry Grant et exerce en participant à des réunions dans sa ville natale. Après avoir monté un premier ensemble avec les très jeunes Hardwick et Greer où on joue les succès du moment, il épouse à l’âge de dix-neuf ans, Edna Thompson.

En 1922, son ami la batteur Sonny Greer, lui offre sa première occasion d’aller jusqu’à la “Big Apple” (New York) en lui faisant bénéficier ainsi qu’à Otto Hardwick, d’une opportunité de contrat au New York Lafayette. Duke joue avec Wilbur Weatman, mais ce ne sont que les premiers pas à New York, où il reviendra peu après à l'instigation du banjoïste Elmer Snowden. Duke Ellingtonpasse alors une grande partie de son temps dans les Rent Parties, ces rendez-vous musicaux imporivss dans Harlem destiné à recueillir des fonds pour payer des loyers et qui, lieux de rencontre et de défi meilleurs pianistes de la ville, sont la plus vivante des académies du "stride".

Associé au parolier Jo Trent avec qui il compose des thèmes pour 50 $ par morceau, tous droits cédés et encouragé par de grands noms du piano comme Fats Waller et James P. Johnson, il écrit, en 1924, sa première partition complète, "Chocolate Kiddies" - sa première composition plus lacunaire date des années 1918 et a pour titre "Soda Fountain Rag". "Chocolate Kiddies" est joué en Allemagne pendant deux ans et interprétée par les chanteuses

Adélaïde Hall et Joséphine Baker, cette première création lui assurera un embryon de célébrité et de bonnes rentrées d’argent. En, 1924, le groupe tourne avec la chanteuse Ada Smith qui les apprécie au point de leur permettre d'être engagés dans une très bonne salle, da là où bat le cœur du jazz à Harlem.

À l’automne, ils se retrouvent au Hollywood Club, futur Kentucky Club et y resteront quatre ans. C’est là que Duke prendra la direction de l’ensemble baptisé comme de juste les « Wahingtonians ». Dans cet orchestre se rencontrent déjà Arthur Whestol, ce trompettiste tout en douceur préfigurateur de l’art d’un Harold Baker, et le délicat saxophonites Otto Hardwick, violoniste à l'occasion. Ellington et Hardwick enregistrent avec des chanteuses de « vaudeville blues », dont Florence Bristol en octobre 1924.

La vie new yorkaise convient tout à fait à Ellington qui s’y révèle un compositeur talentueux, mettant son écriture au service de la revue « Chocolate Kindies ». Débutant dans des clubs de plus en plus remarqués et « select » et se déplaçant du « Kentucky club » ou du « Standard Theater » de Philadelphie à la scène new yorkaise du « Ciro », il enregistre.

Sa première face en tant que leader et arrangeur « Choo Choo » rend audible le passage d’un style encore sautillant à une athmosphère plus expresionniste que l’expression « jungle » résumera deux ans plus tard de façon éloquente. C’est aussi que cette face encore de style hésitante, marque une alliance décisive entre un trompettiste qui expérimente toute la raucité de son instrument, dès qu’il est prolongé par une sourdine, James « Bubber » Miley et les exigences musicales d’un Ellington qui, se souvenant au mieux de l’art de peindre, transforme chacune de ses compositions en autant de miniatures qui racontent une histoire.

C’est ici l’histoire d’un train qui est mise en musqiue, histoire de ce véhicule qui fut souvent celui qu’empruntaient, avec un titre de transport en poche ou des étoiles de contrebande plein les yeux, nombre de Noirs américains soucieux de trouver une existence enfin possible vers le nord du pays. Le thème du train escorte le jazz depuis ses origines. Là le «choo-choo », cet omnibus qui serpente dans les plaines et long des fleuves, va cahin-caha, bringuebalant vaillamment. Il se muera plus tard en « A » train ou « Happy-Go Lucky Local ».

Cette fois-ci, c’est le premier démarrage, le Edward Ellington Orchestra et Bubber Miley sont sur les rails, l’esthétique ellingtonienne et donc tout le jazz orchestral aussi.

Olivier Douville