Les « enfants-sorciers » ou les rejetons de la guerre en Afrique Équatoriale

Un défi pour l’anthropologie psychanalytique *

Par Virginie Degorge[1] et Olivier Douville[2]

Nous exposons ici notre travail de cliniciens mené notamment avec le Samusocial Pointe-Noire (République du Congo) auprès de mineurs en errance et en danger dans les rues. Certains d’eux, les plus jeunes, sont régulièrement accusés d’être des « enfants-sorciers ». Partant donc de ce que l’enfant peut devenir dans le contexte particulier de guerre ou de post-guerre que traversent respectivement la République Démocratique du Congo (RDC) et la République du Congo[3], nous tenterons de prendre appui sur l’anthropologie qui permet de situer les conséquences collectives des destructions massives des systèmes de filiation en leur rapport à l’ancêtre. Nous ne pouvons pas rappeler ici le déroulement des guerres successives en République du Congo (1993-2002) et en RDC (le pays n’est plus en guerre depuis 2002 mais les conflits n’ont jamais cessé, notamment dans la partie Est du pays). Leurs ressorts sont complexes : les conséquences de l’histoire mondiale (colonisation, décolonisation, guerre froide et chute du mur de Berlin, échec des politiques d’ajustement structurel, capitalisme effréné qui réveille le souvenir de la colonisation, etc.) s’intriquent aux situations particulières de chaque pays et sous-région. Les conflits ont entraîné la fuite des populations qui se sont « entassées » dans des zones urbaines plus préservées mais incapables de les accueillir décemment comme à Pointe-Noire. Certains adolescents sont venus seuls, parfois après avoir quitté les rangs d'enfants-soldats ou des familles décimées et éclatées [4]. Tous les jeunes que nous rencontrons sont nés où étaient très jeunes lors des « crépitements » de l'« orage » – nous désignons là deux euphémismes utilisés pour désigner la guerre. Leur naissance a coïncidé avec le chaos, et aux morts non veillés ou sans sépulture répondent des naissances sans cérémonie, des rituels escamotés, de part et d'autre et, finalement, des collusions qui ne sont pas sans effets entre la vie et la mort[5]. Des chercheurs, dont Joseph Tonda[6], Filip de Boeck[7] ou Jaak le Roy[8] (qui est également psychanalyste), indiquent que lorsque ce système de filiation est détruit comme s’il n’avait jamais eu lieu, alors se produit parfois et de contagieuse façon une identification de l’enfant à celui qui donne la mort parce qu’il porte en lui la mort – non pas la mort civilisée par le rituel de l’ancêtre mais la mort sauvage et fantomatique. C’est un enfant « meurtrier » que l’on accuse d'avoir tué ses frères et sœurs, ses parents ou même des centaines de morts tombés sous les balles ou massacrés pendant la guerre. Ils sont parfois accusés par la rumeur de manger de la chair humaine, des cadavres, et les représentations les plus archaïques, les profondes angoisses anthropologiques sont projetées sur ces dits « enfants-sorciers ». Refusant toute naïveté qui identifie sorcellerie et résurgence traditionnelle d’un système coutumier de représentation du malheur, nous situons ce déferlement d’accusations de sorcellerie comme un des signes de la rupture forclusive violente d’avec les fondements symboliques des sociétés, des lignages et des ancestralités. Et l’enfant-sorcier n’est pas seul. En face de lui, le captant, s’affichent et s’avancent des myriades de prophètes guérisseurs, d’églises de guérison diverses, de dispositifs inédits d’exorcismes, des nouveaux médiums, des chamanismes bricolés, violents et hâtifs. C’est tout un système de discours sur le Mal et le malheur qui a implosé, et tout un nouvel appareillage qui surgit, qui tente de conjurer l’horreur et l’obscénité de la mort, qui tente de découper des ombres d’ancestralité dans un crépuscule opaque où se glissent des morts-vivants. On en trouve une illustration dans le documentaire de T. Michel, Congo River, où un homme raconte qu'il était contraint de boire dans le fleuve où flottaient les cadavres « comme des rondins » et, se tournant vers son fils, ajoute « même cet enfant-là pour moi c'était de la merde[9] ». Cela s’entend aussi dans les propos de ce pasteur rencontré par l’un d’entre nous : « Les enfants sorciers sont inconscients et sans pitié. Quand on leur demande de donner (tuer) leurs parents, ils n'hésitent pas. Voyez les enfants soldats, ils commettent les pires atrocités par rapport aux adultes ! ».

Que transmettre lorsque l’histoire ne peut plus faire l’objet de récits ou de mythes, lorsqu’elle est répétition automatique de traumas comme autant d'effractions du réel, lorsque les naissances ne symbolisent plus la continuation de la vie accueillie par des rites mais se surimposent comme réel aux morts qui n’ont pu être honorés dans le chaos de la guerre ? C'est dans la langue même, et en particulier dans les bouleversements du système anthroponymique, que l'on essaiera de penser ces collusions qui produisent l'enfant-sorcier comme altérité radicale qui vient faire pendant à une autre, « l'enfant-divin ». Cette centration sur l’aspect bénéfique ou démoniaque de l’enfant est aussi une innovation, lugubre. Obstinément la demande de sécurité s’exacerbe en exigence de salut. L’imposition de l’imagerie de l’enfant sauveur est aussi une conséquence de l’importante christianisation de cette partie de l’Afrique, très peu islamisée. En revanche, les grands sorciers que l’on pourrait dire sortis des rationalités traditionnelles sont des hommes d’un charisme hors du commun et dont la force sorcière est attestée et déterminée de façon magique, ce sont des personnages-clés des institutions traditionnelles du pouvoir : prophètes coutumiers, sages, thérapeutes, juristes, chefs des castes des chasseurs ou des guerriers (Tonda, 2002)[10].

Une fois modernisée et occidentalisée, la raison sorcière d’antan, la centration sur les deux figures de l’enfant, le sorcier et le divin, laisse place à deux langages reliant les enfants aux parents, et les vivants aux morts. D’une part, celui de cette forme de sorcellerie qui est le langage d’un monde en double, d’un monde où règne la convoitise la plus effrénée et c’est alors l’effacement brutal des équilibres par lesquels la violence sous-jacente à toute forme de lien est régulée par des contraintes nécessaires et justes ; d’autre part, celui d’un salut annoncé par une parole prophétique venant prédire la fin des temps anciens et dénoncer l’aspect éphémère et transitoire du monde présent au profit de l’advenue d’une société et d’une cité de Salut.

Qu'est alors l’enfant dit « enfant-sorcier » ?

Il s'agit d'un phénomène qui s’est développé depuis les années 1990 dans ces pays d'Afrique où des enfants et des adolescents des deux sexes ont été instrumentalisés comme soldats. L'enfant-sorcier est une figure anthropologique nouvelle, différente des figures traditionnelles de la sorcellerie et des stigmatisations toujours actuelles dans certaines régions de nouveaux-nés en fonction de leur naissance ou de tératogénie[11]. Il faut par exemple distinguer ces accusations des terrifiantes stigmatisations d'albinos rapportées ailleurs, ceux-ci n'étant accusés de rien mais tués pour les vertus magiques que l'on prête aux parties de leur corps et qui sont vendues aux féticheurs.

Aujourd’hui qu’une paix toute précaire est revenue, les enfants et adolescents de la guerre errent toutefois non sans péril dans les rues des mégapoles noires. Et dans les deux pays que nous avons cités et connus nombre de ces enfants, qui déambulent sans fin dans les interstices séditieux et désolés de Pointe-Noire ou de Kinshasa, se désignent eux mêmes tantôt comme « enfants-des-rues », « enfants-soldats » ou « enfants-sorciers ». Ces trois termes tendent à se confondre abusivement[12] de façon rapide.

Qu'observe-t-on donc chez ces enfants et adolescents laissés à l’abandon dans ces villes à peine apaisées ? Leurs enrôlements militaires dans des contingents non maîtrisés, irréguliers et sporadiques de combattants occasionnels et toujours violents, ont laissé leur marque. Des adolescents et parfois de jeunes adultes semblent, alors qu’échoués dans les rues, se « bercer » de musiques aux rythmes militaires, répétition d'une violence qui ne se met pas en mots, et racontent des histoires terrifiantes à propos de corps morcelés et décomposés, telles ces rumeurs portant sur le prix des organes humains qu’on trouverait à force de négociations occultes sur le marché des féticheurs. Des plus jeunes encore et qui sont pour beaucoup accusés de sorcellerie avant de fuir dans la rue endossent volontiers parfois cette identité et la responsabilité des crimes qu’on leur impute. Cela montre bien que la détermination de ces sujets dépend de ce qui se déroule dans la version que l’Autre social donne de la mort et de la malédiction. C’est aussi que l’accusation de sorcellerie vient ici désigner toute la destruction des appareils symboliques qui disent la filiation et la dette. L’enfant hors dette, hors lignage, n’a pas été pris en charge par les énoncés qui le situent et l’honorent. Rejeté dans un no man’s land, il est de toute orchestration possible de la filiation, le surplus, l’excès et la hantise.

Les accusations d’« enfants-sorciers » portent sur des enfants ou jeunes adolescents, des deux sexes, parfois dès 3 ans, rarement au-delà de 14 ans[13]. Elles s'appuient sur des critères très vastes : enfant malade, énurétique, désobéissant, travaillant mal ou dormant trop mais aussi enfant sage ou pensif, doué, curieux... bref, tout enfant peut être soupçonné dès lors que son comportement paraît énigmatique et menaçant aux adultes qui l'entourent. Il n’y a cependant pas de mot ou d'expression comme « enfant-sorcier » en Lingala[14] et l’on emploie le terme Ndoki, « sorcier », indifféremment pour un adulte ou un enfant. Les générations sont confondues, ce qui est logique puisque ce qui est dit sorcier est ce qui échappe à la loi de coupure entre les vivants et les morts, entre la nature et la culture et entre les générations. Le sorcier est à la fois hors classe d’âge et représente l’aspect intraitable, non ritualisé hors dette et du nouveau-né et du mort. Il est le fœtus avide non sublimé en nouveau-né, le spectre inquiétant non pacifié en ancêtre.

Mais qui accuse ainsi l’enfant ? La question est d’importance. L’accusation part généralement de la toute proche famille, de ceux qui ont la charge de l’enfant – ces groupes naturels que sont la famille proche ou la famille d’adoption. Elle est parfois validée par une autre institution secondaire. C’est là qu’interviennent les prêtres de ces nouvelles églises, ces sectes pentecôtistes ou évangélistes qui surgissent comme des champignons. Ces églises que l’État contrôle n’ont pas leurs pareilles pour proposer toute une gamme de thérapies collectives, et suggérer au terme de rituels impressionnants à l’enfant accusé qu’il fut bien ce sorcier avide et meurtrier qu’on lui reproche et le persuade d’avoir été. Ces églises qui poussent drues les unes à côté des autres sont les premières et principales officines d’authentification des qualités sorcières supposées à l’enfant, quand elles ne fonctionnent de plus et solidairement comme des lieux de stigmatisation de certains « mauvais » parents, morts depuis peu et qui auraient avec l’enfant coupable scellé une alliance maudite. Un simple examen superficiel de tels dispositifs d’accusation et d’extorsion d’aveux permet de comprendre comment des familles réduites à des lambeaux en rivalité les uns vis-à-vis des autres peuvent ainsi se défausser de toute dette et de tout devoir vis-à-vis et du descendant et de l’ascendant coalisés et maudits par cette stigmatisation que renforce l’aveu. La précarisation des solidarités coutumières dans un climat de persécution et de tensions accrues s’actualise aujourd’hui dans un imaginaire de la sorcellerie qui fait encore plus voler en éclats le principe de la dette infinie entre les générations et engendre en place de ce dispositif de dons et de contre-dons des revendications irruptives et violentes de préjudices. S’en suit alors une déstructuration de la communauté parentale.

Il devient alors clair que l’accusation d’« enfant-sorcier » diffère fondamentalement de l’appellation de l'enfant « qui part et qui revient » codifié sous le terme « enfant-ancêtre ». Un glissement catastrophique s’est opéré de l’enfant dit « ancêtre » à celui dit « sorcier » et il est de taille car si un ancêtre se nomme en ce qu’il représente un fragment de l’histoire des lignées, il en va autrement de cette condensation entre enfant et sorcier qui produit une figure dont la jouissance est si intraitable qu’on ne peut entrer en dialogue avec lui, il convient de l’exclure.

Statut de l’enfant et ambivalence à son endroit

C’est alors que la comparaison entre « enfant-ancêtre » et « enfant-sorcier » s’avère éclairante. L’« enfant-ancêtre » est, comme l’ancêtre[15], l’objet d’une ambivalence certaine

L’ « enfant-sorcier », lui, émerge au moment d’une mutation du statut de l’enfant lorsque que l’urbanisation et le marché bouleversent les repères anciens et que ce bouleversement est de façon catastrophique aggravée par la guerre et par l’ensemble des dénégations qui accompagnent une paix précaire, peu travaillée politiquement et symboliquement, une paix qui s’impose par la mise sous silence forcée des conflits, des violences et des massacres. Pour P. Yengo, si ce phénomène ne relève pas d’une « retraditionnalisation » – une forme de sorcellerie traditionnelle ayant toujours existée – il ne peut non plus être comprise comme une « modernisation ». Il s’agit plutôt des conséquences des « mutations qui affectent [...] la parenté[16] ». Pour J. Tonda, il est à comprendre comme un « des produits des emballements de l’histoire[17] » dans cette partie du monde dont une des conséquences est la « déparentalisation » décrite comme un « processus d’exténuation des liens parentaux, dont la forme limite ici est donnée par le rejet et la criminalisation de leur progéniture par les géniteurs.[18] »

Entre exploitation économique des ressources pétrolières, engouement humanitaire souvent peu réfléchi « pour les enfants » qui tranche avec un certain déni des massacres qui minent la région, se dessinent des hypothèses pour penser, en Afrique, et en partie seulement, la rupture du pacte de solidarité intergénérationnelle. Mais il serait faux de réduire l'imaginaire qui entoure les enfants désafilliés à la figure du sorcier. En effet, dans les deux Congo, une autre figure de l’enfant est aussi présente : l’enfant-divin prié dans les mêmes églises que celles qui concourent à diffuser les accusations de sorcellerie. Pour l'« enfant-divin » comme le sorcier, il y a un effet de la rupture de l’histoire sur la rupture des solidarités générationnelles. Cette rupture ne permet pas l’élaboration de l’ambivalence nécessaire entre les générations. Elle condamne de trop nombreux jeunes de la génération qui vient à leur réclusion dans une altérité radicale qui les destine au sacrifice. Cette altérité radicale perce dans l'aspect cauchemardesque de la figure de l'enfant-sorcier.

La figure « cauchemardesque » des enfants-sorciers

Dans sa conférence du 8 juillet 1953 donnée à la Société Française de Psychanalyse pour ouvrir ses activités, « Le Réel, le Symbolique et l’Imaginaire », Lacan, faisant référence à Ferenczi, envisage que dans la relation, en miroir et asymétrique, entre l’enfant et l’adulte, l’enfant également puisse devenir le lieu de tous les mystères, il serait alors transcendant parce qu’initié : « Les adultes, pour l’enfant, sont transcendants pour autant qu’ils sont initiés. Le plus curieux est que justement les enfants ne sont pas moins transcendants pour les adultes. C’est-à-dire, par un système de réflexion caractéristique de toute relation, l’enfant devient, pour les adultes, le sujet de tous les mystères. C’est le siège de cette sorte de confusion des langues entre enfants et adultes, et un des points les plus essentiels dont nous devons tenir compte quant il s’agit d’intervention sur les enfants[19]. »

L’enfant, on le voit, constitue une énigme qui vire aisément à la menace. Transposons alors le terme d’« initiation » à notre terrain. Nous constatons qu’il est le terme employé pour désigner l’ensemble des opérations qui amène un enfant à devenir sorcier. Si, traditionnellement, le dispositif de chaque initiation implique au moins trois générations référées à l’ancestralité, il n’en va pas de même s'agissant de l’enfant-sorcier. Pas de procédures complexes et rien qui implique le sujet par rapport à des mythes et des rites ancestraux. Le régime de fabrique de l’enfant-sorcier est celui d’une contagion et non celui d’un dispositif coutumier qui confère savoir, responsabilité et dignité. L’on assiste à des générations spontanées de petits meurtriers par des transmissions intragénérationnelles de la sorcellerie. Ces jeunes ont accès à un monde occulte et à des pouvoirs terrifiants obtenus à mesure qu’ils sont réputés avoir tué et mangé des membres de leur famille. Le verbe « manger » est ici polysémique signifiant à la fois tuer, s’enrichir, donner une maladie, copuler, être corrompu[20] et situe l'accusation (et l’auto-désignation) dans le registre des pulsions cannibaliques « cauchemardesques » attribuées aux enfants par les adultes.

Les deux Congo vivent ce climat de menace constante, de guerre toujours possible et imminente entraînant un sentiment de précarité générale. Chaque élection, rare, donne lieu à une désertification des grandes villes, elles sont ironiquement appelées « formalités », autre euphémisme, par la population résignée, souvent lucide. Pas de longs protocoles ici pour introduire les conversations ordinaires comme souvent en Afrique où l’on s’enquiert des parents, des enfants, de la maison… tout semble « cadavere » comme dans l'énumération du chanteur congolais Zao dans Anciens Combattants. Ici, donc, seulement un « Ça va ? » et le plus souvent une réponse performative et anonyme qui concerne l'instant, « On est là », et rappelle que la précarité concerne avant tout la question du temps, désigne ce qui ne dure pas, ce qui ne cesse pas de ne pas durer.

Comme à Océania, lieu de la fiction d’Orwell où les personnes se vaporisent[21], beaucoup de morts au Congo ont disparu plus qu’ils ne sont morts. Les « disparus » du Beach de Brazzaville en 1999, imputés à l’actuel président, sont emblématiques des exactions connues de tous mais jamais condamnées : des centaines de personnes réfugiées à Kinshasa qui, à leur retour en République du Congo, auraient été murées vivantes dans des containers jetés dans le fleuve. Quelques années plus tôt, le fleuve Congo permettait de faire disparaître la nuit les corps des personnes tuées sur ordre de Mobutu. Il en allait ainsi des étudiants « disparus » de Lubumbashi, etc. S’ajoutent à ces « disparus », les morts par millions et l'insistance organique de la matière de ces corps abandonnés à leur destin naturel, autre présentation du réel saturant et non symbolisable qui côtoie les « trous » laissés par les « disparus ».

Chez certains trentenaires et quarantenaires qui ont connu le chaos des guerres successives alors qu’ils étaient adolescents et jeunes adultes, une « mode », qui n’a rien de « traditionnel », a consisté à tatouer son nom sur l’avant-bras dans une calligraphie souvent simple. On pense ici à l'expression familière, après un événement perturbant : « Je ne sais plus comment je m'appelle » mais, plus profondément peut-être, dans ce contexte, à la possibilité d'identifier le corps. Différents, voire radicalement opposés, les sens des noms tatoués semblent cependant devoir être pensés en lien avec la massification de la mort, l’abandon des corps dans la jungle ou dans le fleuve lorsqu’ils ne sont pas finalement enterrés dans des charniers que l'on ne confondra pas avec des sépultures. Gravé à même la peau, ce nom peut, devant une mort omniprésente et des morts « laissés comme des chiens », être le signe de l’humain, l’assurance d’une sépulture minimale, que l'on pourra au moins reconnaître le corps.

Histoire impossible à mettre en récit, massacres forclos de l’histoire collective, états corrompus et complices des grandes puissances qui pillent les ressources, laissant la population exsangue : les enfants-sorciers font figure de boucs émissaires rendus responsables de la mort, la maladie et le malheur : « Le recours au bouc émissaire, écrit Devereux, [...] témoigne combien il nous est difficile, sinon impossible, d'admettre que forces lointaines, complexes, presque anonymes, puissent nous atteindre au cœur de notre existence.[22] » De ces « forces », le « deuxième monde[23] » des enfants-sorciers utilise les signifiants : « distribution » de grades qui empruntent à la hiérarchie militaire (capitaine, colonel…) ou aux fonctions d’État (ministre, conseiller…) mais aussi référence à l’Occident et au « blanc » dont la fréquentation peut étayer une accusation de sorcellerie, ceux-ci étant réputés être de très puissants sorciers notamment parce qu’il serait difficile de les tuer « mystiquement ». Ce « capital sorcier » dont l’enfant-sorcier est un produit serait donc constitué « du génie (du) "Blanc", indifféremment génie du Christ, de l’argent, de la science, de la technique de la sorcellerie, de l’État colonial et néocolonial[24] » et, ajouterons-nous, de la guerre.

On ne rapporte pas ce type d'accusation d'enfant au Rwanda, pays qui n'a pourtant pas été épargné. La présence des églises du « réveil » n'est pas moindre même si le Kimbanguisme n’a pas eu ici le rôle éminent qui aura été le sien dans les deux Congo comme force de contestation des régimes coloniaux. Peut-être faut-il cependant accorder aux commémorations[25] du génocide mais aussi à la mise en cause des autorités nationales et de la communauté internationale, notamment la France, un rôle dans le travail collectif non seulement d’histoire mais aussi de sépulture qui a pu éviter aux enfants de devenir ceux qui, comme sorciers, portent la mort. Rien de tel n’a eu lieu dans les deux Congo et l’histoire insiste en faisant tragiquement retour à travers les enfants-sorciers. Le temps semble arrêté : « Le passé était mort, le futur inimaginable[26] ».

Rupture dans la transmission : la destruction de la langue ou comment nommer ?

Le traitement de la langue en un de ses aspects les moins anodins – les prénoms donnés aux enfants – permet de saisir les effets profonds des trauma répétés et non historisés sur la capacité à nommer et à transmettre.

À la différence du nom, le prénom fait l’objet d’un « choix » en partie inconscient. Il singularise l’enfant et renvoie en même temps à un désir qui lui précède, un fragment d’histoire, le souvenir d’un être cher : « C’est toujours du passé qu’est issu le choix du prénom, il en porte la marque, le destin et le lest[27] ». Il est « affecté », renvoie à ceux qui ont dans le passé porté ce prénom avec l’idée que le nouveau venu héritera de leurs qualités. Cette tradition entraîne que l’on porte régulièrement le prénom d’un ascendant, fût-ce en deuxième ou troisième position. On fait coïncider un prénom et une personnalité, voire un destin et, s’il semble bien difficile de fonder en raison un tel lien, il n’en demeure pas moins que le prénom recèle une part du désir d’un des parents au moins, et qu’à ce désir, nous sommes aliéné. Qu’en est-il lorsque ce choix marque non pas le désir conscient ou inconscient de transmettre un héritage mais une nécessité inconsciente de n’en surtout transmettre aucun ? Et quel en est le prix ?

Depuis quelques années, une nouvelle « mode » préside à la formation des prénoms dans les deux Congo. Si les adolescents rencontrés dans les rues s’appellent souvent « Divin », « Amour », « Grâce », « Christ »…, les plus jeunes portent souvent des prénoms composés à partir de prières décomposées et condensées, mutilées et agglutinées pourrions-nous dire, marque de l’influence incroyable des églises de « réveil ». Parmi ces nouveaux prénoms, inédits, K. Mayizo[28] cite les plus répandus : Gradi (« Grâce à Dieu ») ou Glodi (« Gloire à Dieu ») pour les filles, Jenovic (« Jésus notre Victoire »), Renedi (« Rien n’est impossible à Dieu »), Miradi (« Miracle de Dieu »), Dieusou (« Dieu est souverain »), Mersis (« Merci Seigneur ») ou encore Merdi (« Merci Dieu »), pour les garçons… Une telle façon de former les prénoms a existé en Russie, sous Staline, construits à partir de références au communisme et non à la religion, à l'enfant-divin ou à Dieu comme au Congo. Si ces prénoms ne se sont pas répandus comme actuellement dans le bassin du Congo, dans les deux cas nous nous situons à des périodes où il s’agit de jeter un voile sur le passé, de faire rupture. L’histoire des prénoms au Congo est complexe. Elle remonte aux colonisations successives et aux missionnaires qui « instaurèrent » l’usage du prénom. Mais le système anthroponymique a connu des bouleversements plus récents. Après avoir changé le nom du pays, du fleuve et des villes puis « zaïrianisé[29] » son prénom, Joseph-Désiré devenant Sese Seko Kuku Ngbendu Waza Banga, Mobutu exige en 1972 l'abandon des prénoms chrétiens pour des post-noms[30] « zaïrois » censés être ceux des ancêtres. En interdisant ainsi les prénoms chrétiens, il obligeait paradoxalement à l'abandon de prénoms qui avaient été ceux des ancêtres depuis des générations, qui avaient fondé des « fraternités homonymiques[31] » entre porteurs du même prénom, enfin, qui avaient été les leurs depuis la naissance d’où leur survivance clandestine malgré l’adoption des nouveaux post-noms pendant la période de l'« authenticité[32] ». Cela fut possible au prix de déformations des prénoms chrétiens. D'autres eurent recours à un répertoire élargi de noms communs, de noms de marques ou à des prénoms issus d’autres cultures que celles du colonisateur et donc moins reconnaissables. Le « retour à l’authenticité » imposé par Mobutu semble ainsi avoir souvent redoublé l’acculturation coloniale plutôt qu'effacé, ce qui semble bien illusoire, les cicatrices de l’histoire. Il résulte de ces mutations forcées du système anthroponymique un répertoire chaotique, composite, inventif, voire franchement extravagant. Mais voir dans cette extension exponentielle du registre des prénoms seulement la marque de la créativité dans la langue serait méconnaître l’histoire sanglante qui y a présidé. Elle apparaît plutôt comme « le signe de désarroi d’un comportement acculé à l’excentricité et qui, pour "survivre", devait compter sur des expédients.[33] » En effet, la multiplication du registre des prénoms ne s’est pas arrêtée en 1990 avec la fin de l'interdiction des prénoms chrétiens proclamée par Mobutu et s'est répandue dans la République du Congo voisine. On voit dans ces manipulations infinies qui mutilent les signifiants existants, les rendant méconnaissables, pour produire à chaque génération des prénoms inédits, la marque de traumatismes profonds qui entravent la transmission et la nomination. Il s'agirait d'une tentative pour résoudre cette question : comment nommer ces enfants pour qu’à travers eux ne puisse être éveillé le cauchemar de la guerre ? Alors que la Novlangue d’Orwell semble épargner les prénoms (même si les seuls enfants, ceux des Parsons, ne sont jamais nommés), s'ajoute ici aux euphémismes ou à l'absence de mots pour dire le sexuel, la mort et la guerre, une refonte répétée à chaque génération du répertoire des prénoms, non pour en ressusciter d'anciens ou en emprunter ailleurs mais pour en créer d'inédits.

Au Congo, cette façon de bricoler, à chaque génération, une gamme inédite de prénoms, et aujourd’hui de signifiants obtenus par mutilations et agglutinements, permet selon nous, avant tout, d'en forclore d'autres, en particulier les noms des morts qui ne sont alors plus prononcés, et a pour cause/effet la pétrification du souvenir. Sur la matière même de la langue, on observe l’effet de déliaison de la pulsion de mort lorsque ces néo-prénoms « [éveillent] le minimum d’écho dans l’esprit de celui qui [parle][34] », empêchant par là les possibilités de liaisons associatives qui auraient permis de retrouver, dans une fiction narrative transformant le trauma, les fils de l’histoire. Cette façon d'éviter de reconduire le prénom d’un mort témoigne de l'impossibilité actuelle de séparer vivants et morts, entraînant que des enfants aux prénoms « divins » portent cette mort lorsque Dieu et Diable se confondent à travers les accusations d'enfants-sorciers. Cette tentative de rupture radicale, car certainement vitale, signe souvent une impossibilité d'accueillir la génération qui vient.

Le documentaire de F. Dhelens et J.-P. Mari[35] évoque les morts-vivants produits par des années de massacres, ici à travers le récit d'un militaire de la MONUC chargé d'enterrer dans un charnier les innombrables cadavres. Traumatisé par cette expérience et l'idée qu'il a peut-être enterré des vivants, il se souvient d’une femme congolaise qui amène son bébé mort qu’elle porte au dos. Se pensant hors de vue des militaires, elle tentera de se fondre, auprès de son enfant, dans la multitude des corps du charnier. Une femme congolaise nous rapporte – et il faut souligner la rareté de ces récits tant le mutisme succède aux euphémismes pour dire la mort – avoir entendu un bébé pleurer longtemps une nuit avant de s'endormir, pensait-elle, dans une parcelle voisine. Le lendemain, elle découvrait ce nouveau-né mort dans le chemin, comme jeté au monde, bout de réel pulsionnel qu'aucun désir n'aura pu humaniser, objet a pourrions-nous dire, mais surtout objet déconnecté du fantasme et dès lors réduit au rang de déchet à l'image des morts sans sépultures. C’est bien de la mise à sac de l’Autre en tant que trésor du signifiant qu’il s’agit, et, à partir de cette ruine, se fait jour, en hantise, l’équivalence du sujet et de l’objet.

L’enfant-divin côtoie donc ici l’enfant-sorcier au point de se confondre avec lui. Nous sommes ici en face de deux altérités radicales situées dans un au-delà de l’ambivalence. Elles sont les dépôts de l’in-nommable qui « sape » la langue. On voit la marque de ce travail de sape au sein du dispositif anthroponymique. Essoufflé, ce dernier ne se reconduit plus à chaque génération et il ne relie pas à une lignée tous ces enfants dont nous parlons ici. Les systèmes de nominations des references et des affiliations, lieu d’efficace du Nom-du-Père, est bien en peine d’accueillir et de relier ces jeunes à un champ signifiant antécédent. Le patronyme s’efface, gommé, ruiné, par le surnom qui accable et stigmatise. La fonction du nom coalise alors l’objet et le significant. C’est alors dans le traitement même que subit la langue commune dès qu’elle produit, comme automitiquement, ces nouvelles designations, dans sa matière meme que vient faire retour le réel des corps mutilés et agglutinés. La démétaphorisation de la parole vivante ne va pas sans vouer au néant la génération qui vient. C’est ainsi que le travail de reconstruction psychique ne peut se limiter à une réparation d’un supposé trauma mais implique nécessairement de reconsidérer l’état des processus et les dispositifs de nomination par lesquels un sujet est présenté au monde et par lesquels le monde lui a été présenté. On dira autrement, s’il est inséré dans un système lignager traditionnel efficace, le sujet reçoit quelque chose de l’ancêtre (un talent, une vertu, un trait de caractère, etc.) et il ne le reçoit que s’il est constitué dans l’ordre ordinaire des dons, des dettes et des sacrifices. Une transmission de l’ancêtre à l’enfant est possible, elle doit être alors interprétée afin d’être reconnue. Certes tous les enfants, dans toutes les cultures, sont possiblement des représentants des morts. Et dès la naissance du tout petit s’inaugure un dialogue avec les ancêtres. « A qui appartient l’enfant », telle est bien une des questions directrices qui donne sens et direction à de tels dialogues. Parfois les vrais parents peuvent être situés dans l’au-delà et les parents biologiques sons réduits à des parents de substitution, mais qui vont, ici-bas, accomplir leur tâche parentale. Tout cela a été finement étudié par l’anthropologue Doris Bonnet [36]. Ce qui change avec le jeune dit « enfant-sorcier » est bien qu’il ne représente pas le mort, le parent de l’au-delà, qu’il n’est plus le fruit d’une double roigine (les ancêtres reconnus et honorés comme tels et les parents dans la réalité) mais qu’il présente la part sauvage de la mort, celle avec la quelle on ne dialogue pas, celle avec laquelle on ne négocie aucune dette, celle qui indivise. Les ancêtres, rappelait A. Barry [37], ont une fonction continue. Ils deviennent ancêtres après leur mort et fonctionnent dans un monde qui est en reflet du monde des humains. À l’inverse, les sorciers occupent une fonction discontinue. Ils font brèche et sur-individualisent au risque de la folie. Redisons le : le sorcier est ce qui reste de l’ancêtre lorsque sont abrasés les institutions et les discours qui font tenir le principe d’ancestralité, lequel régit les articulations signifiantes des lignages et des dettes.

Vampirisé par un mort-mal mort, ou radicalement seul, mais le plus souvent plongé dans une errance lugubre et funeste, il est radicalement sans parent symbolique. Comment alors l’accueillir ? C’est là que revient la dimension du sujet de l’énonciation, extrêmement précarisée lorsque le nom qui désigne le sujet l’assigne à une place où est mis à sac le système des représentations généalogiques. Il est alors rendu compact. Il n’est plus que cela par quoi il est stigmatisé. Comment exister alors si ce n’est pas l’agir, l’excès, la violence de l’acte qui réagit et fait pièce à la violence de la pétrification ? Comment signer alors son existence ? Sur quel manque-à-être prendre appui lorsque l’on est sans relâche renvoyé à la disparition de l’ancestralité signifiante et qu’on ne peut s’y loger ?

Entendons bien qu’il n’y a pas d’être-sorcier de ces enfants. L’ethnopsychiatrie se tromperait à en faire une catégorie clinique comme elle le fit si peu prudemment pour l’enfant ancêtre. Les jeunes eux-mêmes configurent vraisemblablement leur façon de se présenter en fonction de ce qu’ils savent du discours courant tenu sur l’enfant sorcier, et pour certains parmi eux, en fonction de leur passé extravagant de cruauté lorsqu’ils faisaient la guerre. Mais c’est bien alors tout l’ensemble du système de prise en charge des enfants qui pose question, au moment où en RDC fleurissent des églises de guérisons qui systématisent les accusations de sorcelleries afin de vendre leurs dispositifs d’exorcisme ; en face et à rebours, modestement aussi l’éveil de la psychiatrie communautaire qui tente d’aller vers l’énonciation de chacun et de la favoriser [38].

C’est bien là l’enjeu ; offrir quelques chances à un dialogue possible de toute une société avec son passé récent et avec sa jeunesse. Cet enjeu est aussi digne de l’attention des psychanalystes et des anthropologues européens [39].

Virginie Degorge et Olivier Douville

* Texte réécrit à partir des deux interventions de V. Degorge et d’O. Douville lors des Journées d’Espace Analytique, « Qu’est-ce qu’un enfant ? », le 9 octobre 2011.

[1] Psychologue clinicienne, A.T.E.R. Université Paris 7 Denis Diderot, Laboratoire CRPMS, EA 3522, Université Paris 7 Denis Diderot.

[2] Psychanalyste, Maître de conférences des Universités, Laboratoire CRPMS, EA 3522, Université Paris 7 Denis Diderot.

[3] Nous ferons essentiellement référence à ces deux pays, même si le phénomène des enfants-sorciers s’est propagé dans d’autres pays d'Afrique.

[4] O. Douville, “Pour dire la guerre”, entretien avec Sylvain Thévoz, Hétérographje, 7, printemps 2012, pp. 66-71

[5] O. Douville, V. Degorge, « Quelle vie psychique se fige et se reprend dans l'errance adolescente », dans O. Douville (sous la dir.), Clinique psychanalytique de l'exclusion, Paris, Dunod, 2012, pp. 108-133.

[6] J. Tonda, « Capital sorcier et travail de Dieu », Politique africaine n° 79, octobre 2000, pp. 48-65.

[7] F. de Boeck, « Au-delà du tombeau : histoire, mémoire et mort dans le Congo/Zaïre postcolonial », PTAH, Revue de l’Association Rencontres Psychanalyse, Anthropologie et Recherches sur les processus de socialisations, A.R.A.P.S., 1998, 7/8, « Effet d’histoire, Production du politique », pp. 51-80.

[8] J. Le Roy, « Disruption and reconstruction of identities and families in Kinshasa (Congo): the therapeutic function of faith healing groups », A.M.P. Séminary 1998-1999, http://www.psychomedia.it/neuro-amp/98-99-sem/leroy-en.htm

[9] T. Michel, Congo River, film documentaire franco-belge (116'), Les film de la Passerelle, 2006.

[10] J. Tonda, La guérison divine en Afrique centrale (Congo, Gabon), Paris, Karthala, 2002.

[11] P. Yengo, « Le monde à l’envers. Enfance et kindoki ou les ruses de la raison sorcière dans le bassin du Congo », Cahiers d’études africaines, 2008/1 n°189-190, p. 299.

[12] V. Degorge, « Les enfants dits "sorciers" dans les rues congolaises », Le journal des psychologues, 2010/2, n°274, p. 36-39.

[13] Elles concerneraient essentiellement des enfants de 4 et 7 ans pour P. Yengo (2008), mais nos observations concernent également de jeunes adolescents.

[14] À l’inverse, les « enfants-soldats » sont généralement appelés kadogos et il existe beaucoup de mots pour désigner les dits « enfants des rues » : phaseur, shege, moineaux, ainsi qu’une série d’expressions en lingala construites sur le modèle « bana- », « enfant-» : bana inbwa (« chiots »), Bana Mayi (« caïd », plus âgés), Bana Lunda (ceux impliqués dans le trafic de diamant)… en fonction des âges. Voir P. Yengo, « Le monde à l’envers. Enfance et kindoki ou les ruses de la raison sorcière dans le bassin du Congo », op. cit, p. 310.

[15] S. Freud (1912-1913), Totem et Tabou, Paris, Payot et Rivage, 2001.

[16] P. Yengo, « Le monde à l’envers. Enfance et kindoki ou les ruses de la raison sorcière dans le bassin du Congo », op. cit., p. 298.

[17] J. Tonda, « La violence de l’imaginaire des enfants-sorciers », Cahiers d’études africaines, 2008/1 n°189-190, pp. 325-326.

[18] Ibid., p. 332.

[19] J. Lacan (1953), “Conférence sur Le Réel, le Symbolique et l’Imaginaire”, consultable sur le site « Pastout Lacan » http://www.ecole-lacanienne.net/pastoutlacan50.php p 13

[20] J. Tonda, Le souverain moderne. Le corps du pouvoir en Afrique Centrale (Congo, Gabon), Paris, Karthala, pp. 197-236.

[21] G. Orwell, 1984, Paris, Gallimard, 1950 p. 32.

[22] G. Devereux (1965) « La voix des enfants », dans Essais d'ethnopsychiatrie générale, Paris, Gallimard, 1970, p. 134.

[23] F. De Boeck, « Le "deuxième monde" et les "enfants sorciers" », Politique africaine, 2000, n° 80, p. 32-57.

[24] J. Tonda, « Capital sorcier et travail de Dieu », op. cit., p. 56.

[25] Elles ont parfois pris une forme violente lors de l'exhumation et de l'exposition de corps qui rappelle l'obligation faite aux personnes vivants près des camps de concentration de défiler devant les charniers.

[26] G. Orwell, 1984, op. cit., p. 41.

[27] R. Gori, Y. Poinso, « Nom prénom et vérité. Essai d’anthropologie clinique », Mouvement Psychiatrique, 13, 1972, p. 45.

[28] K. Mayizo, « Les sapeurs du Français : Kerwin Mayizo et les noms congolais », La danse des mots, émission du 24 juin 2011, RFI. Notons que « sapeurs » fait référence au mouvement né après les indépendances des deux Congo. L’appartenance à la « Sape » s’exprime essentiellement par l’exhibition de tenues excentriques, voyantes, de préférence « de marque ».

[29] La « zaïrianisation » ou « retour à l’authenticité » vise à se défaire de l'aliénation coloniale de l’identité et de la culture « africaine » en ciblant les symboles de l’Occident.

[30] I. Ndaywel è Nziem, « De l’Authenticité à la Libération : se prénommer en République démocratique du Congo », Politique Africaine n°72, décembre 1998, p.103.

[31] Ibid., p103.

[32] Ibid., p108.

[33] Ibid., p108.

[34] G. Orwell, 1984, op. cit., p. 404.

[35] F. Dhelens, J.-P. Mari, Sans blessure apparente. Enquête chez les damnés de la guerre, documentaire, 62', Mano a mano production, 2010.

[36] D. Bonnet, “L’éternel retour”, L’Homme, 131, juillet-septembre 1994, pp 93-110

[37] Barry, A. : Le corps, la mort et l’esprit du lignage, L’ancêtre et le sorcier en clinique africaine , Paris, L’Harmattan, 2001

[38] Le Roy J., N’Situ Adelin “La psychiatrie infanto-juvénile à l'épreuve de la rue à Kinshasa” Le Journal des psychologues 2010/1 (n° 274) pp 21-28

[39] Douville O. “Pour une anthropologie clinique contemporaine” Psychologie Clinique nvvl. Série, 33, 2°12/1 “Nouveaux terrains. Inventer la pratique”. (sous la dir. De O. Douville et C. Wacjman), Paris, EDK pp 201-226